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Petit rappel : Qui peut émettre des reçus fiscaux ?

Revenons sur une notion importante : seuls les organismes qui sont reconnus comme étant d’intérêt général au sens fiscal peuvent émettre des reçus fiscaux.

Pour être d’intérêt général, plusieurs conditions doivent être réunies, mentionnées aux articles 200 et 238 bis du Code général des impôts (CGI). L’organisme doit avoir :

  • une gestion désintéressée,
  • des activités non lucratives,
  • un des caractères prévus par la loi (art. 200 et 238 bis) ou un statut particulier,
  • un siège et des actions en France et dans l’espace européen (sauf cas particuliers).

Par ailleurs, l’organisme ne doit pas agir au profit d’un cercle restreint de personnes.

Lorsqu’il réunit toutes ces conditions, on considère qu’il est d’intérêt général. Il est donc éligible au régime du mécénat et peut délivrer des reçus fiscaux à ses donateurs.

Pour mémoire, lorsque les reçus fiscaux sont, sciemment, délivrés de manière indue, l’administration applique une amende dont le taux est égal à celui de la réduction d’impôt, soit 66 ou 75 % pour les dons des particuliers et 60 % pour les dons des entreprises.
Article 1740 A du CGI

À quoi ressemble un reçu fiscal ? Quelles mentions ?

La loi séparatisme a rendu obligatoire la délivrance d’un reçu fiscal aux entreprises mécènes. Le nouveau modèle de reçu fiscal pour les entreprises a été publié en juin 2022.

Il existe désormais deux modèles de reçus fiscaux :

  • le reçu fiscal pour les dons des particuliers Cerfa n° 11580*04
  • le reçu fiscal pour les entreprises, le Cerfa n° 16216*01

Ce nouveau reçu fiscal pour les entreprises doit être délivré pour tous les dons des entreprises qui ont été faits depuis le 1er janvier 2022.

S’il n’est pas obligatoire de les utiliser tels quels sur la forme (vous pouvez utiliser un logiciel spécifique ou des modèles faits en interne par exemple), ils contiennent, sur le fond, toutes les mentions obligatoires qui doivent être présentes sur les reçus fiscaux :

  • informations liées au bénéficiaire des versements : dénomination, adresse, objet et type d’organisme d’intérêt général (parmi la liste proposée par l’administration fiscale) – à noter, le Siren du bénéficiaire doit être indiqué dans le modèle de reçu pour les entreprises ;
  • informations liées au donateur/mécène ;
  • informations liées au don (forme, nature, montant) : dans le modèle du reçu pour les entreprises, une distinction est faite entre les dons en nature et les dons en numéraire ;
  • date et mode de paiement.

Par ailleurs, votre reçu fiscal doit avoir un numéro d’ordre. Il est recommandé de donner aux reçus fiscaux une suite numérique chronologique annuelle sans interruption. Si un reçu devait être annulé pour une raison ou une autre, il ne faut pas provoquer de rupture dans la suite chronologique des reçus.

Les obligations déclaratives

document loi

De nouvelles obligations déclaratives s’imposent depuis plusieurs années, tant pour les organismes recevant des dons que pour les entreprises mécènes.

Obligation pour les entreprises de déclarer les dons (seuil à 10 000 €)

La loi de finances pour 2019 a mis à la charge des entreprises une nouvelle obligation qui entraîne, corrélativement, certaines obligations pour les organismes recevant les dons.

En effet, les entreprises qui effectuent au cours d’un exercice plus de 10 000 € de dons et versements ouvrant droit à la réduction d’impôt prévue au présent article déclarent à l’administration fiscale :

  • le montant et la date de ces dons et versements ;
  • l’identité des bénéficiaires ;
  • ainsi que, le cas échéant, la valeur des biens et services reçus, directement ou indirectement, en contrepartie.

Cette valorisation des contreparties directes et indirectes reçues doit être effectuée par les organismes bénéficiaires des dons, elle ne peut pas être réalisée par l’entreprise1.

Les organismes bénéficiaires des dons doivent donc toujours prévoir un moyen de valoriser les contreparties qu’ils accordent, pour pouvoir communiquer les montants aux donateurs concernés.

femme écrit ordinateur

Nouvelle obligation de déclaration des organismes recevant des dons

La loi séparatisme a introduit une nouvelle obligation visant au contrôle du régime du mécénat, à l’article 222 bis du CGI.

Cette fois-ci, ce sont les bénéficiaires des dons qui sont concernés. Ils doivent procéder à une déclaration obligatoire annuelle à l’administration fiscale :

  • du montant global des dons et versements mentionnés sur les justificatifs et perçus au cours de l’année précédente ou du dernier exercice clos s’il ne coïncide pas avec l’année civile ;
  • du nombre de documents délivrés au cours de cette période.

Cette déclaration est applicable aux documents délivrés pour les dons et versements reçus à compter du 1er janvier 2021 ou au titre des exercices ouverts à compter de cette date.

Le défaut de déclaration est passible d’une amende qui s’élèvera à 1 500 € en cas d’infraction répétée, pour la deuxième année consécutive à l’obligation de dépôt de la déclaration.

Trois possibilités existent pour déclarer les dons :

Un guide pratique est également disponible pour procéder à la déclaration sur ce site.

Pour la première année d’application (reçus fiscaux émis à compter du 1er janvier 2021), l’administration accorde un délai allant jusqu’au 31 décembre 2022 pour satisfaire à cette obligation déclarative. Pour les organismes qui auraient déjà déposé leurs déclarations 2065 ou 2070, il sera donc possible de déposer une déclaration rectificative avant le 31 décembre 2022.

Les informations à produire dans cette déclaration peuvent être facilement obtenues grâce au registre des reçus fiscaux émis. Les organismes doivent donc impérativement s’organiser.

Nouveautés concernant les dons étrangers

Attention, la loi séparatisme a également introduit une mesure importante de contrôle des dons provenant de l’étranger. Ainsi, les organismes bénéficiaires doivent tenir un état séparé de ces avantages et ressources provenant de l’étranger dans l’annexe aux comptes annuels. La mise en oeuvre de cette obligation suppose une véritable procédure d’identification et de traçabilité de ces dons.

La mesure est en attente d’un règlement de l’Autorité des Normes Comptables (ANC) qui viendra préciser le format du document inséré dans les comptes annuels. L’entrée en vigueur effective est prévue au 1er janvier 2023.

1 : BOI-BIC-RICI-20-30-20-20190807 §130 et suivants

La procédure de contrôle des reçus fiscaux

La 1re étape

Un contrôle sur place de la délivrance des reçus fiscaux a été mis en place par la loi de finances rectificative pour 2016. Ce dernier, applicable aux dons reçus à partir du 1er janvier 2017, implique une vérification sur place de la correspondance des sommes figurant sur les reçus fiscaux avec les versements effectivement perçus et ayant donné lieu à la délivrance de ces reçus
Article L. 14 A du Livre des procédures fiscales - LPF

Attention

Attention, s’il s’agit d’un contrôle sur place, il est néanmoins distinct d’une vérification de comptabilité.

Ce contrôle suppose de conserver pendant 6 ans, à compter de leur date d’établissement, les pièces permettant à l’administration de procéder à ces contrôles.

Les reçus concernés par ce contrôle sont, bien entendu, ceux répondant aux mentions obligatoires identifiées dans le Cerfa. Mais il peut également s’agir des conventions de mécénat par exemple.

Les documents examinés lors du contrôle sont notamment :

  • livres et documents comptables ;
  • registre des dons ;
  • copie des reçus fiscaux émis ;
  • relevés de comptes financiers, etc.

L’objectif est, pour le vérificateur, de pouvoir établir un lien entre la liste des reçus délivrés, leur date et leur montant avec les sommes encaissées. Il est important de se munir d’un tableau de rapprochement.

La 2e étape

Avec la loi séparatisme, ce contrôle des reçus fiscaux a été étendu. Alors que celui introduit en 2016 porte sur le contrôle de la cohérence entre les montants portés sur les reçus délivrés et les dons effectivement perçus (de la forme donc), l’article L. 14 B du LPF nouveau étend ce contrôle à celui de la régularité de la délivrance des reçus fiscaux. Il s’agit donc désormais d’un contrôle sur le fond sur la possibilité d’émettre des reçus fiscaux (contrôle de l’éligibilité au mécénat).

Cette nouvelle procédure est entrée en vigueur au 1er janvier 2022.

Nous attendons toujours les commentaires de l’administration fiscale sur cette extension de contrôle, qui permettra de mieux visualiser l’interaction entre les deux procédures, les périmètres et modalités de mise en oeuvre.

Les conseils

Toutes les nouvelles mesures qui s’ajoutent d’années en années ne peuvent qu’inciter les organismes à s’organiser pour tout ce qui touche aux dons et au mécénat.

D’une part, les organismes doivent procéder, en interne, à une analyse fréquente de leur situation fiscale et vis-à-vis du mécénat. Ils peuvent se constituer un dossier spécifique qui comprend tous les documents utiles à l’analyse. Cette dernière peut être faite annuellement, afin de prendre en compte tous les éventuels changements qui auraient pu intervenir.

Il n’est pas obligatoire de faire un rescrit fiscal ou un rescrit mécénat. Néanmoins, s’il s’agit d’une décision stratégique de l’organisme, une attention particulière devra être portée à la rédaction du rescrit. Mieux vaut se faire accompagner d’un professionnel.

D’autre part, les organismes devront mettre en place plusieurs procédures en interne qui leur permettront de sécuriser les flux financiers et de s’assurer d’être en possession de toutes les informations nécessaires au respect des diverses obligations. Cette bonne organisation sera également très appréciée en cas de contrôle.

Points d’attention et conseils en matière de reçus fiscaux
Ce qu’il faut faire Ce qu’il ne faut pas faire
Une suite chronologique annuelle sans interruption (pas de rupture en cas d’annulation : conservez l’exemplaire annulé pour preuve) Pas de destruction des reçus annulés
> À conserver dans le registre des dons avec une mention « reçu annulé »
Mise en place d’un journal/registre des reçus fiscaux émis avec un classeur contenant les copies des reçus émis aux bénéficiaires Donner au reçu qui remplace celui annulé le même numéro
> Il faut donner un nouveau numéro en respectant la chronologie
Pour les dons effectués par chèques bancaires : remises de chèques par lots indépendants et homogènes pour faciliter leur repérage et le pointage avec le compte comptable concerné Ne pas respecter les mentions obligatoires prévues par l’administration fiscale
Rapprochement mensuel en cas de grande quantité de dons et reçus Avoir un tableau de rapprochement qui ne justifie pas
> Total des reçus fiscaux émis = total des dons reçus en banque = total des dons comptabilisés
Intégrez les conventions de mécénat en fin de rapprochement
Intégrez les abandons de frais des bénévoles à titre de dons (lorsque c’est possible)

Auteur

Acteur majeur de l’expertise comptable en France, In Extenso accompagne au quotidien plus de 6 000 acteurs de l’économie sociale. ess.inextenso.fr.