Gestion désintéressée

Sur le plan fiscal, le bénévolat est au cœur de l’exigence d’une « gestion désintéressée » pour qu’une association puisse bénéficier du régime d’exonération des impôts commerciaux.

Par exemple, une association qui recourt à beaucoup de bénévoles est un indice important de l’existence d’une gestion désintéressée.

L’examen du caractère désintéressé de la gestion d’un organisme est un préalable dans l’analyse de son régime fiscal conformément aux dispositions définies dans l’instruction du 18 décembre 2006 aujourd’hui intégrée dans le « BOFiP-impôts » (Bulletin Officiel des Finances Publiques).

Cette instruction prévoit une démarche en trois étapes, dont la première consiste dans l’examen du caractère désintéressé de la gestion.

Ainsi, pour qu’une association soit considérée comme non lucrative sur le plan fiscal, elle doit remplir les trois critères suivants :

  • Sa gestion doit être désintéressée ; ce caractère désintéressé de la gestion est subordonné au respect des trois conditions suivantes :
    • la gestion et l’administration doivent être assurées à titre bénévole par des personnes n’ayant elles-mêmes, ou par personne interposée, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats d’exploitation ;
    • l’association ne doit procéder à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfices, sous quelque forme que ce soit ;
    • les membres de l’association et leurs ayants droit ne peuvent être déclarés attributaires d’une part quelconque de l’actif, sous réserve du droit de reprise des apports.
  • Si l’association se livre à une activité concurrentielle, elle doit l’exercer dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, c’est-à-dire sans faire concurrence à ces dernières. Ces conditions doivent être appréciées au regard de quatre critères : par le produit qu’elle propose, le « public » qui est visé, les « prix » qu’elle pratique et la « publicité » qu’elle fait (règle des « 4P ») ;
  • Enfin, elle ne doit pas avoir pour activité de rendre des services à des entreprises qui en retirent un avantage concurrentiel.

Bon à savoir

Ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu’une association utilise le service d’une main-d’œuvre salariée, à condition que le salaire versé corresponde à un travail effectif et que son montant ne soit pas excessif, compte tenu des usages professionnels.

Une association qui remplit les conditions de la non-lucrativité échappe à l’ensemble des impôts commerciaux. Réciproquement, une association qui présente un caractère lucratif, c’est-à-dire qui exerce ses activités dans des conditions similaires à celles d’entreprises commerciales qu’elle concurrence, est soumise à l’impôt sur les sociétés, à la contribution économique territoriale (CET) (anciennement taxe professionnelle) et à la TVA, sous réserve des exonérations spécifiques à chacun de ces impôts.

Pour respecter le critère de gestion désintéressée, une association doit s’abstenir de rémunérer ses dirigeants, de distribuer ses bénéfices et d’attribuer ses biens à ses membres.

Statut du dirigeant bénévole

L’association est, par principe, gérée à titre bénévole. De manière générale, la gestion d’un organisme est désintéressée si l’activité de ses dirigeants est exercée à titre bénévole. En effet, le temps passé à la gestion ne doit procurer aucune rémunération directe ou indirecte aux administrateurs ou aux dirigeants membres de l’association.

Les dirigeants qui siègent dans les organes de gestion (principalement conseil d’administration ou bureau) ne doivent avoir aucun intérêt direct et indirect aux résultats financiers de l’association et ne peuvent pas percevoir de rémunération ou dérivés (avantages, frais, etc.) pour l’exercice de leur fonction de dirigeant au sein de l’organe de gestion de l’association. Dans le cas contraire, ils sont assimilés à des dirigeants de fait par l’administration fiscale, et deviennent donc, au regard de cette dernière, directeurs ou administrateurs.

Il s’agit là de l’une des différences fondamentales entre une association et une société commerciale : une association peut développer une activité économique dont elle retire des revenus, mais les dirigeants (administrateurs, présidents, trésoriers...), mêmes fondateurs de l’association, ne peuvent pas partager les bénéfices éventuellement dégagés par ces activités. A défaut, l’association risquerait d’être traitée comme un « commerçant de fait », notamment au regard des impôts commerciaux.

La notion de dirigeant recouvre les dirigeants de droit, c’est-à-dire les membres du conseil d’administration ou de l’organe qui en tient lieu, quelle qu’en soit la dénomination, mais aussi toute personne qui assumerait de fait la direction effective d’un organisme (dirigeant de fait). Sera considérée comme dirigeant de fait la personne qui déterminera les orientations de l’association et en supervisera la gestion en lieu et place des dirigeants statutaires, sans avoir été régulièrement investi du pouvoir de représenter l’association. Cette qualification de dirigeant de fait emporte des conséquences importantes, tant pour l’association que pour l’intéressé, notamment en termes de responsabilité.

Conseil

Il faut bien distinguer les dirigeants bénévoles des « directeurs » et « directrices » salariés. Il est évidemment possible pour une association d’embaucher des salariés pour exercer des fonctions de direction opérationnelle (direction d’un service, d’un établissement, directeur administratif...), à condition que la personne choisie ne fasse pas partie des administrateurs élus et qu’elle ne siège pas au bureau. Les statuts peuvent prévoir que le directeur salarié de l’association se voit reconnaître une simple voix consultative au conseil d’administration (ce que l’administration admet). Les directeurs salariés doivent, comme tout salarié, être impérativement placés dans un lien de subordination vis-à-vis du président de l’association.

Par ailleurs, les salariés, s’ils peuvent être membres de l’association à titre personnel, ils ne peuvent cependant pas faire partie des dirigeants de l’association, sauf à être représentants du personnel, ou dans les conditions définies et inscrites dans les statuts.

Ils ne doivent en aucun cas représenter plus de ¼ des membres du conseil d’administration.

Rémunération du dirigeant bénévole

Le fait de rémunérer un dirigeant alors que son activité relève normalement du bénévolat présente un risque pour l’association. En effet, l’administration fiscale peut interpréter cette rémunération d’un dirigeant comme un élément clé faisant tomber le caractère bénévole et désintéressé de la gestion de l’association, entraînant par conséquence la « lucrativité » de l’association et son assujettissement aux impôts commerciaux (TVA, impôts sur les sociétés, contribution économique territoriale, etc.).

Rémunérations à prendre en compte

Les rémunérations et éléments assimilés à prendre en compte, pour savoir si une association est gérée de manière bénévole, sont ceux que perçoivent les dirigeants de droit et de fait :

  • salaires proprement dits ou assimilés (honoraires, etc.) ;
  • prise en charge de dépenses personnelles (mise à disposition gratuite d’une voiture prise en charge par l’association, voire d’un logement de fonction...) ;
  • augmentation des ressources personnelles (loyers versés au dirigeant au titre d’un bail jugé anormalement bas...) ;
  • avantages indirects au dirigeant ou aux personnes liées au dirigeant (avantages consentis par une entreprise, utilisation gratuite d’une salle de réception par les membres de la famille...) ;
  • remboursements de frais (de restauration, de déplacement, etc.).

Bon à savoir

Ces rémunérations versées aux dirigeants d’une association remettant en cause le caractère désintéressé de l’association peuvent intervenir dans différents cas de figure :

  • bien sûr la rémunération au titre du mandat social ; autrement dit, pour l’exercice stricto sensu des fonctions de dirigeant au sein de l’association (présence aux réunions du conseil d’administration et assemblées...),
  • mais aussi la rémunération ponctuelle pour l’exécution d’une mission précise (réalisation d’un rapport ou d’une négociation par exemple).

Attention

Il arrive qu’un dirigeant d’association soit, par ailleurs, salarié de l’association qu’il dirige en contrepartie d’une activité effective sans rapport avec sa fonction de dirigeant. Néanmoins, il faut savoir que, face à cette situation, l’administration fiscale refuse en général de dissocier les deux fonctions et estime en conséquence que la gestion de l’association n’est plus bénévole. Le fait que le salaire octroyé au dirigeant soit de faible montant ne permet pas de maintenir la notion de non-lucrativité.

Les exceptions légales de rémunération des dirigeants dans les « grandes associations »

Les « grandes associations », à savoir celles qui ont des ressources supérieures à 200 000 € par an, ont la possibilité de rémunérer certains dirigeants, mais en respectant des conditions – cumulatives – très strictes. L’association doit assurer :

  • 1. une transparence financière, qui se manifeste par : le fait que les statuts doivent explicitement prévoir la possibilité de rémunérer certains dirigeants ; une délibération et un vote de l’instance délibérative statutairement compétente doivent fixer le niveau et les conditions de rémunération hors de la présence du dirigeant concerné ; la certification des comptes de l’association par un commissaire aux comptes, etc. ;
  • 2. un fonctionnement démocratique, qui se manifeste par : l’élection démocratique régulière et périodique des dirigeants ; un contrôle effectif sur la gestion de l’organisme effectué par les membres de l’association ;
  • 3. L’adéquation de la rémunération aux sujétions des dirigeants, c’est-à-dire aux contraintes imposées par l’association aux intéressés, ce critère étant rempli notamment si la rémunération versée est la contrepartie de l’exercice effectif de son mandat par le dirigeant concerné et qu’elle n’est pas excessive.

La tolérance administrative des ¾ du Smic

Face à la volonté légitime de certaines associations de pouvoir rémunérer leurs dirigeants de façon accessoire et raisonnable, alors même que la direction d’une association est en principe bénévole, l’administration fiscale a développé ce qu’on appelle la « tolérance administrative des ¾ du Smic ».

Cette tolérance permet à l’association de fournir à ses dirigeants une rémunération brute mensuelle ou des avantages en nature inférieurs ou égaux aux ¾ du Smic sans que cela ne remette en cause le caractère désintéressé de la gestion de l’association. Les éléments de rémunération à prendre en compte sont ceux précédemment cités : salaires, avantages, cadeaux... à l’exception des remboursements de frais justifiés à l’euro près dans le cadre de l’activité de l’association. Cette faculté ne bénéficie qu’aux « grandes associations », concrètement celles dont le montant des ressources annuelles, hors ressources issues de versements publics (subventions en particulier), ne dépasse pas 200 000 € annuellement. Plus précisément, ce seuil est fixé à 200 000 € pour pouvoir rémunérer un seul dirigeant, à 500 000 € pour pouvoir en rémunérer deux, enfin, à 1 000 000 € pour pouvoir en rémunérer trois.

Bon à savoir

À compter du 1er mai 2023, la rémunération mensuelle ne doit pas excéder 1 747,20 € brut (le Smic mensuel ayant été porté à cette date à 1 310,40 € brut pour une base de 35 heures), la période à retenir pour le calcul étant l’année soit 12 fois le Smic mensuel. Le niveau de rémunération des ¾ du Smic s’apprécie par dirigeant et non par association.

Un dirigeant qui exerce plusieurs mandats dans diverses associations peut être rémunéré dans la limite des ¾ du Smic par chacune des associations (sauf si ces différentes associations sont liées entre elles). Ces rémunérations relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).

Attention

Le plafond de la rémunération aux ¾ du Smic n’est pas applicable aux salariés chargés de représenter le personnel au conseil d’administration. La rémunération des salariés ne fait l’objet d’aucune limite dans la mesure où le travail effectif et le montant octroyé revêtent un caractère normal et qu’aucun complément de salaire ou une modulation de celui-ci n’est déterminé en fonction d’un éventuel intéressement au chiffre d’affaires ou au nombre de produits vendus par exemple. Il importe toutefois que la rémunération versée revête un caractère raisonnable.