Un objet déterminé

La rédaction de l’objet de l’association est d’importance, car c'est lui qui détermine la capacité juridique de l’association à agir. C’est le principe de spécialité. L’objet doit être précis, détaillé et évolutif.

L’association ne peut valablement agir que dans les limites de son objet statutaire : tous les actes accomplis pour le compte de l’association par son représentant et qui ne rentreraient pas dans son objet statutaire ou qui ne favoriseraient pas sa réalisation peuvent être déclarés nuls. Encore faut-il que cette nullité soit invoquée...

C’est la raison pour laquelle il convient d’apporter une très grande attention à la définition de l’objet statutaire.

Un « objet sportif » : quelles conséquences ?

Une association sportive pour quoi faire ? De la simple réunion d’amis pratiquant un sport en commun (association de fait) au club encadrant des sportifs de haut niveau (association agréée et affiliée), quelles sont les situations où l’objet « sportif » de l’association a une influence ?

Un objet licite

L’objet de l’association ne doit pas être illicite, c'est-à-dire ne pas être contraire aux lois ou aux bonnes mœurs ou porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement.

Les sanctions du caractère illicite de l’objet sont :

  • d’une part la nullité de l’association,
  • d’autre part, sa dissolution judiciaire (prononcée par le tribunal judiciaire) ou administrative (prononcée par décret pris en conseil des ministres, lequel décret pouvant ensuite être attaqué devant le Conseil d’État) en cas d’atteinte à l’intégrité du territoire national ou à la forme républicaine du gouvernement.

À ainsi été déclarée nulle, en raison du caractère illicite de son objet, une association ayant pour but de mettre en rapport des personnes afin qu’elles concluent un accord de « mère porteuse », une telle convention étant jugée contraire au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain ainsi qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes. De même, au nom de la lutte contre le « hooliganisme », la dissolution d’« associations de supporters » pour violence est régulièrement décidée par le ministre de l’Intérieur.

Bon à savoir

Le Conseil d’État a récemment validé la dissolution prononcée en conseil des ministres d’une association dite « islamiste » sur le fondement de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, aux motifs, d’une part, que les messages publiés sur les comptes des réseaux sociaux de l’association et de son président ainsi que les commentaires qu’ils suscitaient incitent à la discrimination, à la haine ou à la violence, d’autre part, que les prises de position du président de l’association révélaient l’existence d’agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme. L’association en cause a demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre en urgence cette dissolution, mais sa demande a été rejetée.

Le juge relève tout d’abord que les propos tenus par le président de l’association, reconnu comme son principal dirigeant, responsable de sa communication, adressés indifféremment à partir de ses comptes personnels ou de ceux de l’association sur les réseaux sociaux pouvaient être imputés à l’association. Il juge ensuite que certains de ces messages, notamment ceux appelant à des « châtiments » sur les victimes de l’attentat contre le journal Charlie Hebdo ou exposant à la vindicte publique des personnes nommément désignées, constituaient des discours incitant à la discrimination, à la haine ou à la violence, de nature à permettre la dissolution de l’association.

Il juge également que les nombreux commentaires haineux, antisémites ou appelant au meurtre suscités par les messages du président de l’association ont pu également être pris en compte en l’absence de toute action récente visant à leur suppression et à la mise en garde des abonnés aux comptes.

CE, ord., 25 nov. 2020, Association « Barakacity », n° 445774

Saisi par une association qui contestait sa dissolution prononcée par le Gouvernement également sur le fondement de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, le juge des référés du Conseil d'État a constaté que cette association promeut une idéologie incitant à la haine et à la violence envers les étrangers et la religion musulmane. Par son organisation, sa communication et ses actions, cette association se positionne comme un recours face aux forces de l’ordre prétendument défaillantes. Le juge des référés estime donc que la dissolution de cette association est proportionnée à la gravité des risques pour l’ordre public et la sécurité publique résultant des activités de l’association.

CE, ord., 3 mai 2021, Association « Génération identitaire », n° 451743

Enfin, dans une autre affaire, le juge des référés du Conseil d’État a suspendu la mesure de dissolution de deux associations pro-palestiniennes, notamment parce qu’il a considéré que l'instruction comme les débats lors de l'audience n'ont pas établi que les prises de position de l'une des deux associations, bien que radicales, voire virulentes sur la situation au Proche-Orient et le conflit israélo-palestinien, constitueraient des incitations à la discrimination, la haine et la violence pouvant justifier une mesure de dissolution. De même, il a estimé que l'appel au boycott de produits israéliens par la seconde association ne peut en soi justifier une mesure de « dissolution » en l'absence d'autres agissements incitant à la haine ou à la violence.

CE, ord., 29 avr. 2022, Association « Comité Action Palestine », n° 462736 ; CE, ord., 29 avr. 2022, Collectif « Palestine Vaincra », n° 462982

Un objet autre que le partage des bénéfices

L’objet de l’association doit être autre que le partage des bénéfices entre ses membres.

En aparté

Ne pas confondre objet et moyens d’action (qui devraient faire l’objet de 2 articles distincts des statuts). Ainsi une association n’a pas pour objet l’organisation de cours ou d’ateliers (moyens d’action) mais plutôt l’enseignement ou l’apprentissage dans tel ou tel domaine ; elle n’a pas non plus pour objet la publication d’une revue (moyen d’action) mais l’information dans son domaine...

Gérard Laville, Service 1901

La raison d’être

Le contexte aujourd’hui

Depuis mai 2019 et la promulgation de la loi PACTE, les entreprises qui le souhaitent peuvent se doter d’une raison d’être. Généralement, celle-ci répond à la question « que fait l’entreprise dans le monde, que lui apporte-t-elle ? ». C’est une question de sens et d’utilité sociétale de l’entreprise. Souvent rédigée en une phrase, elle décrit une ambition d’intérêt général et fait la synthèse avec l’activité commerciale. Attention toutefois, ce n’est ni la mission, ni la vision de l’organisation sur son marché. La raison d’être est le chapeau qui réconcilie l’activité commerciale et les enjeux sociaux et environnementaux. Pour les entreprises qui le souhaitent, elles peuvent aussi faire évoluer leur statut juridique et se transformer en « entreprise à mission ». Dans ce cadre, l’entreprise se dote non seulement d’une raison d’être, mais aussi d’objectifs sociaux et environnementaux à atteindre, inscrits dans ses statuts. D’autres obligations légales de transparence, notamment, viennent compléter le dispositif de la mission.

Souvent opposées aux entreprises étant donné leur statut et leurs missions différentes, les associations ont depuis longtemps crues qu’elles étaient l’unique garant de l’intérêt général. Avec le développement du mécénat, des partenariats entre ONG et entreprises, l’apparition des fondations d’entreprises ou encore l’explosion de l’Économie Sociale et Solidaire, cette séparation et répartition claire des rôles est devenue de plus en plus poreuse. La définition d’une raison d’être et le statut d’entreprise à mission enfonce le clou et supprime définitivement toute exclusivité de l’intérêt général au monde associatif. Mais les associations aussi peuvent définir leur raison d’être !

Définir sa raison d’être

Loin des slogans de communication, c’est l’occasion de redéfinir le projet associatif et de faire le lien entre la cause que l’organisation défend (son combat sociétal), les enjeux mondiaux (qu’ils soient sociaux ou environnementaux), mais aussi des contraintes économiques pour se donner les moyens de ses ambitions. Pour certaines organisations non lucratives, ce sera peut-être l’opportunité de filialiser des activités qui pourraient entrer dans le champ concurrentiel dans une entreprise à mission. Quelques soient les motivations de définition de votre raison d’être, il s’agit avant tout d’une intégration des enjeux sociaux et environnementaux au cœur même de la mission, de la vision et des valeurs de votre organisation. Cela fait le lien avec votre démarche de responsabilité sociétale dans une logique d’intégration au cœur des activités.

Comment faire ?

Définir sa raison d’être est une opportunité de dialogue avec les parties prenantes et d’engagement afin d’identifier les dominateurs communs qui font sens pour chacun. Ce n’est pas un travail secret et individuel. Cela doit être une occasion unique de collaboration et d’intelligence collective avec la gouvernance, les salariés, les bénévoles, les bénéficiaires, mais aussi les partenaires financeurs qu’ils soient privés ou publics.

Conseils

Les 17 Objectifs de Développement Durable de l’ONU et leurs cibles, peuvent être un bon outil pour cela. Vous pouvez par exemple questionner vos parties prenantes sur leur vision quant à vos contributions aux 3 ou 4 ODD prioritaires compte tenu de vos activités. Vous pouvez aussi réaliser des groupes de travail et les faire réagir à des propositions de rédaction différentes : challenger les idées, traduire cela en applications concrètes, hiérarchiser des enjeux...

Et après ?

Une bonne raison d’être doit être en cohérence avec chaque organisation et ses activités. Une fois définie, elle doit faciliter la prise de décision et être un guide, un repère pour l’action. C’est une fois définie que tout commence : les activités, les actions, les budgets, la stratégie, les indicateurs de pilotage doivent passer au tamis de la raison d’être. Elle doit s’incarner dans la feuille de route stratégique.