Un PV de l’organe compétent doit être établi pour prononcer la sanction et ainsi justifier de la régularité de la procédure disciplinaire et du respect des droits de la défense.

Un membre d’une association de tir sportif, qui occupe par ailleurs la fonction de vice-président, reçoit de l’association une lettre lui notifiant une mise à pied à titre conservatoire. Il est ensuite convoqué à un entretien préalable à la suite duquel lui a été notifiée son exclusion définitive, fin novembre 2017. Il conteste la procédure et les motifs de son exclusion et, en avril 2018, assigne l’association pour demander la nullité de la décision d’exclusion et sa réintégration tant en sa qualité d’adhérent que dans ses fonctions dirigeantes. Il a sollicité également la condamnation de l’association à lui verser à titre de dommages-intérêts les sommes de 1 000 euros par mois à compter du mois de décembre 2017 en réparation du préjudice d’agrément et de 6 000 euros en réparation du préjudice moral et d’image. Au soutien de ses prétentions, il dénonce les conditions dans lesquelles une sanction disciplinaire a été prononcée à son encontre en dehors des clauses statutaires de l’association.

En première instance, l’association n’ayant pas constitué avocat, le juge accueille les demandes mais réduit à 3 000 euros le montant des dommages et intérêts, tous postes de préjudices confondus.

L’association relève appel, ce qui donne l’occasion à la cour de se pencher sur la procédure disciplinaire prévue par les statuts. Il ressort du règlement intérieur de l’association que la qualité de membre actif se perd par l’exclusion sur décision du comité directeur suite à une faute et que :

« La commission de discipline est mise en place ponctuellement par le Comité Directeur. Elle est composée de 5 membres du Comité Directeur convoqué pour l’occasion.
L’adhérent concerné devra être convoqué devant la commission de discipline par lettre recommandée avec accusé de réception. Un délai de 15 jours minimum doit être respecté entre la convocation et la comparution devant le conseil de discipline.
Il est invité à s’expliquer.
Après son audition, la Commission de Discipline se réunit à huis clos puis propose au Comité directeur une sanction contre l’adhérent. La commission de discipline peut acter en l’absence de l’adhérent.
Une décision d’exclusion peut être notifiée au membre par lettre recommandée. »

Il appartient en conséquence à l’association d’établir qu’elle a respecté la procédure disciplinaire selon ses statuts et son règlement intérieur, qui prévoient notamment que la procédure disciplinaire est menée par un organe ad hoc mis en place ponctuellement. Or, si elle justifie avoir convoqué le demandeur 15 jours avant « son entretien préalable à une sanction disciplinaire » le 8 décembre 2017 pour le 12 janvier 2018 à 19 heures, cette convocation adressée par le président précise « convocation en nos bureaux » et non devant la commission de discipline prévue à cet effet. La cour relève qu’aucune pièce ne précise quels sont les 5 membres de la commission de discipline réunie à cet effet, ni comment ils ont été désignés, ni si l’entretien préalable a bien eu lieu devant la commission de discipline.

Une lettre du 11 décembre 2017 adressée par le président de l’association, mais non signée, précise au demandeur l’ensemble des griefs qui lui sont reprochés avant l’entretien préalable.

Une pièce intitulée dans le bordereau de l’association « compte rendu de la commission de discipline du 12 janvier 2018 » ne comporte que la première page d’un document sans titre qui démarre ainsi : « objet : CR entretien préalable » et précise : « présents : H I, J K, B L, M N, O P, F G, B Q, R S, T U, Y V, Monsieur X ». Puis, le document poursuit ainsi : « suite à l’entretien de ce jour, je voudrais rappeler les faits qui sont reprochés à X Y. Le 7 décembre 2017, celui-ci a fait l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire à raison des faits suivants''… etc. ». La cour considère que ce document est incomplet et qu’il ne permet pas d’affirmer qu’il s’agit d’un compte rendu d’entretien de la commission de discipline, les membres présents étant 10 et non pas 5 comme l’exige le règlement intérieur. De plus, ce document, tel qu’il est annoncé dans le bordereau de pièces de l’association, devrait relater les échanges entre la commission de discipline et l’adhérent convoqué ; or, il se contente de ne préciser que les faits reprochés après l’entretien comme cela est mentionné sur cette seule page.

Enfin, la proposition de la commission de discipline à 5 membres identifiés décidant à huis clos et saisissant le comité de direction comme le prévoit le règlement intérieur n’est pas fournie aux débats par l’association. N’est produit que le procès-verbal relatant deux décisions des 7 membres du Comité Directeur réuni le 18 janvier 2018 en réunion extraordinaire en présence du président qui n’a pas participé aux votes pour veiller à l’impartialité des décisions alors qu’il était visé par les insultes et voies de fait dénoncées.

Les juges sont contraints de conclure que l’association ne justifie pas de la régularité de la procédure disciplinaire et notamment de la désignation de la Commission de Discipline comme le prévoit le règlement intérieur. En conséquence, ils confirment le jugement en ce qu’il a dit que la décision d’exclusion en date du 23 janvier 2018 prise par l’association à l’égard du demandeur est nulle et de nul effet, que le demandeur doit être réintégré en qualité d’adhérent de l’association et dans les fonctions qu’il occupait antérieurement à cette décision, et condamnent l’association à lui verser la somme de 2 300 euros à titre de dommages et intérêts.

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel