L’action d’une association souhaitant faire annuler une circulaire émise par le gouvernement doit justifier d’un intérêt à agir direct pour être recevable.

La cour administrative d’appel de Nancy confirme que la branche régionale d’une association de soutien au peuple palestinien, n’a pas un intérêt à agir contre la circulaire du garde des Sceaux du 10 octobre 2023. Celle-ci concerne les propos relatifs à la situation en Israël et Palestine pouvant être qualifiés d’apologie du terrorisme. Elle s’adresse aux magistrats du parquet et les invite à poursuivre les auteurs d’infractions susceptibles d’être commises en lien avec les attaques terroristes subies par Israël depuis le 7 octobre 2023.

Analyse de l’objet statutaire

Selon la jurisprudence administrative, l’intérêt à agir d’une association s’apprécie au regard de son objet statutaire (pour une illustration récente : CE 14 mai 2024, req. n° 491862).

Dans chaque cas d’espèce, le juge saisi est donc invité à procéder à un examen minutieux de cet objet. Dans l’affaire ici jugée, la cour administrative d’appel de Nancy relève que l’objet statutaire de l’association requérante est de « développer et de favoriser l’amitié et la solidarité entre le peuple français et le peuple palestinien par tous les moyens appropriés. Pour remplir cet objet, l’association se propose de : faire connaître le peuple palestinien, son histoire, sa culture, ses épreuves et ses luttes, notamment par l’organisation de diverses manifestations ; faire connaître toute sorte d’atteinte subie par le peuple palestinien notamment sur les libertés des individus et collectives, leur propriété, et à leur droit à l’autodétermination ; développer l’aide matérielle et humanitaire au peuple palestinien ; œuvrer pour l’établissement d’une paix réelle et durable fondée sur la reconnaissance des droits nationaux du peuple palestinien, sur la base de la légalité internationale ; établir des liens avec les organisations, mouvements ou individus qui poursuivent les mêmes objectifs localement, en France et dans le monde ».

Exigence d’un intérêt direct

La cour poursuit en rappelant le critère général d’appréciation de l’intérêt à agir posé par la jurisprudence administrative et auquel elle se réfère habituellement, notamment en présence d’une requête émanant d’une association (CE 30 juill. 2014, req. n° 375430) : « l’intérêt à agir d’un requérant s’apprécie au regard de l’objet des dispositions qu’il attaque et non du contenu de ces dispositions ». En l’occurrence, elle estime que la seule circonstance que certaines des actions de l’association requérante ou celles de ses adhérents seraient susceptibles de faire l’objet de poursuites pénales ne suffit pas à lui conférer un « intérêt suffisamment direct » pour agir contre la circulaire du 10 octobre 2023. Et d’en conclure qu’il en résulte que l’association n’est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que c’est à tort que le président de la cinquième chambre du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d’annulation de cette circulaire et d’injonction « au motif de leur irrecevabilité manifeste ».

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel