La Cour de Cassation estime qu’un volontaire de service civique ne relève pas du service public, et que la responsabilité de l’État ne peut être engagée en cas de manquement à l’obligation de sécurité.

Une jeune fille a conclu avec une association française bénéficiant d’un agrément délivré par l’Agence du service civique (ASC) une convention pour la réalisation, au titre du service civique, d’un projet de mobilité internationale au sein d’une association marocaine qui devait se dérouler du 21 novembre 2018 au 20 mai 2019, ainsi qu’un contrat d’engagement pour une mission d’appui aux activités pédagogiques, culturelles et artistiques organisées par cette association au profit d’enfants et de jeunes marocains.

Le 23 novembre 2018, un accord de partenariat a été conclu entre l’association française, l’association marocaine et la jeune fille qui, à son arrivée au Maroc, a été hébergée dans un logement mis à disposition par l’association marocaine. Malheureusement, la jeune fille est décédée dans ce logement, son décès ayant été attribué à une intoxication au monoxyde de carbone.

Rejet de la qualification de collaborateur du service public

Les ayants droit de la victime décédée – ses parents – ont d’abord saisi la juridiction administrative d’une demande de condamnation de l’État au paiement de différentes sommes en réparation de leurs préjudices, estimant que la jeune fille avait exercé sa mission en qualité de collaborateur du service public. En effet, les collaborateurs des services publics ont le droit d’obtenir réparation des préjudices subis par eux au cours de l’accomplissement de leur mission, alors même qu’aucune faute ne peut être reprochée à l’administration (CE, ass., 22 nov. 1946, Commune de Saint-Priest-la-plaine, Rec. p. 279). Mais la juridiction administrative s’est déclarée incompétente.

Ils ont alors assigné en responsabilité et indemnisation l’État devant le juge judiciaire, sans davantage de succès. La cour d’appel de Paris a, en effet, refusé la qualification de collaborateur du service public à la jeune fille. Pour ce faire, elle a estimé que l’enseignement du français à de jeunes étrangers, sur un territoire étranger et en dehors du cadre scolaire, au sein d’une association privée de droit étranger, certes agréée pour l’accueil de volontaires du service civique mais non sous la tutelle d’un ministère français – et non au sein d’une école, un collège, un lycée ou un établissement d’enseignement supérieur français, seuls établissements relevant des missions de service public du ministère de l’Éducation nationale –, est indépendant du service public de l’enseignement.

Obligation de sécurité de l’association

Les parents de la victime ont alors formé un pourvoi en cassation, mais celui-ci est également rejeté aux termes d’un raisonnement en deux temps. En premier lieu, selon la Cour de cassation, relèvent seuls de la compétence de la juridiction judiciaire les litiges relatifs aux contrats de service civique ou de volontariat associatif. En second lieu, dès lors que, se fondant sur l’examen des contrats conclus avec les deux associations, française et marocaine, la cour d’appel a relevé que la mission confiée à la jeune fille, bien que d’intérêt général, ne relevait pas du service public de l’enseignement.

Elle ajoute que cette mission était accomplie en exécution de ces contrats et sous la responsabilité des associations, sans intervention de l’État, et que l’intéressée, dont le statut s’apparentait à celui d’un étudiant, n’était pas placée sous l’autorité et le contrôle de celui-ci ni de l’association française, mais de ses cocontractants. De sorte que, accomplie hors de tout service public, cette mission ne pouvait conférer à la jeune fille la qualité de collaborateur occasionnel ou permanent du service public, c’est à bon droit que la cour d’appel a rejeté les demandes indemnitaires dirigées contre l’État. Une telle demande ne peut donc viser que l’une ou l’autre des associations.

Une association paraît, en effet, tenue d’une obligation de sécurité – probablement simplement de moyens – à l’égard d’un volontaire qui accomplit, dans le cadre du service civique, une mission au sein d’une association ou simplement encadrée par celle-ci (v. par analogie : Civ. 1re, 8 avr. 2021, n° 19-20.796), qui pose le principe selon lequel une association est tenue à une obligation de sécurité de moyens à l’égard de toute personne participant à un événement qu’elle organise). C’est dire que l’issue d’une pareille demande indemnitaire paraît ici des plus aléatoires...

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel