Dans la cartographie des risques au travail, la question du harcèlement est un chantier majeur, qui touche une personne sur cinq à l’échelle mondiale selon une enquête de l’Organisation Internationale du Travail. Plus spécifiquement, le harcèlement sexuel est devenu une question prioritaire au cours des dix dernières années. De nombreuses prises de paroles et études ont dévoilé son ampleur en France, notamment l’enquête du Défenseur des Droits de 2014 qui révèle que 20 % des femmes actives ont été confrontées à une situation de harcèlement sexuel au cours de leur vie professionnelle, et estime que près de 30 % des victimes n’ont signalé leur situation à personne.

Face à ce constat, les pouvoirs publics ont entamé en 2012 une redéfinition du cadre législatif entourant le harcèlement sexuel.

Définition du harcèlement sexuel

Cette démarche a été initiée dans l’urgence, après la décision du Conseil Constitutionnel du 4 mai 2012 d’abroger la version alors en vigueur de l’article 222-33 du code pénal, considérant qu’il ne donnait pas une définition précise des éléments constitutifs du délit de harcèlement sexuel. Il s’en est suivi un vide juridique considérable. En effet, dès le lendemain de la décision, il n’était plus possible de porter plainte pour des faits de harcèlement sexuel.

La loi du 6 août 2012 a permis de repartir sur des bases juridiques solides pour lutter contre ce fléau, en apportant une définition précise pour qualifier les faits de harcèlement sexuel, inscrite à l’article L. 1153-1 du code du travail :

  • Le harcèlement sexuel est constitué « par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».
  • Est assimilée au harcèlement sexuel « toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers ».

Cette définition est reprise dans l’article 222-33 du code pénal, qui précise également les sanctions correspondantes.

Bon à savoir

Le décret du 30 mars 2023 renforce la répression de l’outrage sexiste, désormais défini à l’article R625-8-3 du code pénal comme le fait « d'imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créé à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».

Ces faits sont désormais punis d’une amende pouvant aller jusqu’à 1 500 euros ou 3 000 euros en cas de récidive.

Les sanctions encourues pour des faits de harcèlement sexuel

Les faits de harcèlement sexuel sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

Plusieurs circonstances aggravantes peuvent porter la sanction à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, « lorsque les faits sont commis :

  • par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
  • sur un mineur de moins de quinze ans ;
  • sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
  • sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
  • par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;
  • par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique ;
  • alors qu'un mineur était présent et y a assisté ;
  • par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ».

Bon à savoir

Toute association ou fondation reconnue d’utilité publique régulièrement déclarée depuis au moins 5 ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de combattre les discriminations fondées sur le sexe ou sur les mœurs ou sur l’orientation ou l’identité sexuelle, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les discriminations lorsqu’elles sont également commises à la suite d’un harcèlement sexuel. Leur champ d’intervention est donc étendu.

Elles doivent toutefois justifier avoir reçu l’accord écrit de la personne concernée, ou de son représentant légal si elle est mineure.

Source : Code de procédure pénale, article 2-6

Les obligations de prévention du harcèlement sexuel

L’employeur doit prendre « toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner ».
Article L. 1153-5 du code du travail

Il doit a minima afficher le texte de l’article 222-33 du code pénal dans les lieux de travail et dans les locaux où se fait l’embauche, ainsi que les coordonnées des autorités et services compétents en matière de harcèlement sexuel : le médecin du travail ou service de santé au travail, l’inspection du travail, le Défenseur des droits, le référent prévu à l’article L. 1153-5 du code du travail dans toute structure employant au moins 250 salariés, le référent prévu à l'article L. 2314-1 du code du travail lorsqu’un comité social et économique (CSE) existe.

À noter

La question du harcèlement sexuel nourrit une jurisprudence abondante. Les décisions de justice rendues en la matière constituent une source utile pour mieux cerner la qualification des faits de harcèlement sexuel et les comportements qui y correspondent, ainsi que les obligations de l’employeur, tant dans la prévention que dans la sanction des auteurs des faits, sans oublier les risques qu’il encourt en cas de discrimination des victimes ou témoins de harcèlement sexuel.

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel