Erwan Royer – Rédacteur en chef du Pôle Droit Public aux Éditions Dalloz, Juris associations - Partenaire Crédit Mutuel
Les associations sont indispensables à la mise en œuvre par les collectivités territoriales des politiques publiques au niveau local tout particulièrement. Ceci étant des dérives ont pu être constatées dans certaines structures du monde associatif, démontrant que le « vivre ensemble » qui est fondement de toute vie démocratique et de toute société est loin d’être un acquis intangible. À la suite de nombreux rapports, le législateur a décidé d’intervenir pour endiguer des comportements confondant liberté de religion et séparatisme qui entachent l’engagement associatif dans son ensemble. Pour cela, le choix a été fait de s’appuyer sur les associations pour lutter contre les dévoiements du « pacte républicain » tout en renforçant l’arsenal répressif. Pour cela, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République accroît le contrôle des associations et la transparence de leurs actions. Deux séries de dispositions constituent des marqueurs forts : il s’agit d’une part, de celles encadrant la commande publique, et notamment tout ce qui concerne de près ou de loin la gestion d’un service public ; de l’autre, de celles renforçant des contrôles.
S’agissant de la commande publique, le dispositif adopté vise à faire en sorte que les associations auxquelles est confiée, en tout ou partie, l’exécution du service public – ce qui recouvre finalement une large part des contrats de la commande publique (marchés et délégations de service public notamment) – garantissent que leurs salariés et leurs sous-traitants assurent l'égalité des usagers devant le service public et veillent au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public. Les contrats passés entre les collectivités et les associations depuis le 25 août dernier devront ainsi être modifiés pour intégrer ces clauses de respect des règles de neutralité. Pour les contrats en cours ou pour lesquels une consultation a été lancée avant le 25 août 2021 mais qui se terminent avant le 25 février 2023, ces clauses n’ont pas à être insérées. En revanche, pour ceux s’achevant après le 25 février 2023, les acheteurs et autorités concédantes ont un an (jusqu’au 25 août 2022) pour les intégrer.
Concernant le renforcement des contrôles sur les associations, il s’exerce tant sur la demande de financement à la collectivité que sur son mode de fonctionnement. C’est ainsi que toute association qui sollicite l’octroi d’une subvention auprès d’une collectivité territoriale devra – et ce dans l’attente d’un décret d’application – souscrire un contrat d’engagement républicain portant obligation de respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République, le caractère laïque de celle-ci et l’abstention de toute action portant atteinte à l’ordre public. Ce contrat ne doit pas être pris à la légère. Il devra en effet assortir aussi bien toute convention de subventionnement que toute décision unilatérale d’octroi d’une subvention, et aura une valeur contraignante à la différence des chartes d’engagements réciproques déclinées localement. Par ailleurs, et outre le fait que le respect du contrat conditionne l’obtention d'un agrément ou la reconnaissance d'utilité publique pour certaines associations, tout manquement à ce contrat ou au refus de le signer pourra conduire la collectivité territoriale à refuser ou à un retirer sa subvention.
De plus, le contrôle sur les associations ne s’arrête pas aux seuls financements numéraires. La loi renforce la transparence sur les avantages accordés par les collectivités pour la construction de lieux de culte. Les communes et départements devront informer préalablement le préfet, avant toute garantie publique pour un emprunt destiné à la construction d’un édifice cultuel, ou la conclusion d’un bail de longue durée. Enfin, les financements étrangers reçus par les associations loi 1901 qui touchent plus de 153 000 euros de dons par an et par les fonds de dotation seront contrôlés. Pour les associations « mixtes », relevant de la loi du 1er juillet 1901 et exerçant un culte, leurs obligations, notamment administratives et comptables, sont alignées sur celles des associations cultuelles (dont la certification dans certains cas de leurs comptes, la distinction comptable de leurs activités cultuelles du reste de leurs activités). Le préfet pourra même enjoindre à une association dont l'objet est en réalité l'exercice d'un culte à se déclarer comme association cultuelle. La confiance n’interdit pas le contrôle !