Laurent Simo – Expert-comptable et commissaire aux comptes, co-directeur département Économie Sociale - In Extenso - Partenaire Associathèque

Les établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) sont soumis à des cadres budgétaires imposés par l'État, l'Assurance-maladie et les départements, en contrepartie de l’obtention d’une tarification qui leur est propre. Ainsi, la tarification et le financement d’un ESMS constituent la contrepartie des prestations rendues par un établissement ou service.

La mise en place des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) implique le passage d’une logique budgétaire à une logique financière. Le budget de l’établissement est alors qualifié d’Etat prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD), intégrant les projections budgétaires et d’investissement. Ce document comporte également des indicateurs financiers permettant de visualiser la santé financière des ESMS d’un même organisme.

Cependant, ces outils financiers sont souvent insuffisamment utilisés :

  • d’une part, parce qu’ils sont centrés par établissement et n’apporte pas une vision globale d’une association gestionnaire de plusieurs établissements ;
  • d’autre part, ils sont souvent vécus comme une contrainte supplémentaire et n’incitent pas forcément à prendre le recul nécessaire pour en tirer les informations essentielles.

Dans ce contexte, il est nécessaire qu’une analyse financière interne soit effectuée, impliquant la direction opérationnelle et les administrateurs concernés par les questions financières. Elle débutera systématiquement par une analyse statique : bilan fonctionnel, calcul des équilibres financiers et des soldes intermédiaires de gestion le cas échéant. Elle se poursuivra par une analyse dynamique : prévisionnels d’investissement et tableau de financement.

L'appréciation de l'équilibre financier s’effectuera essentiellement à partir du bilan, et à travers l'étude :

  • du fonds de roulement, c’est-à-dire la partie des ressources permanentes qui ne sont pas utilisées pour le financement de l'actif durable ;
  • du besoin en fonds de roulement (BFR) qui exprime la différence entre les besoins de financement et les ressources de financement liés au cycle d'exploitation et hors exploitation.

Cette analyse permettra de déterminer à un moment donnée la capacité de l’entité à générer de la trésorerie ou à l’inverse de recourir à des financements.

Il demeure nécessaire d’adapter cette appréciation au regard des spécificités financières des ESMS par la prise en compte des provisions réglementées, des provisions à long terme (engagements de retraite), des subventions d’investissement, etc.

Le plan pluriannuel d’investissement doit être établi au niveau macro de l’association gestionnaire. Par le biais du calcul préalable de sa capacité d’autofinancement, l’entité doit être en mesure d’estimer le niveau d’emprunts auquel elle doit recourir pour financer tous les investissements prévus, mais aussi d’évaluer sa capacité de remboursement.

Le calcul de ratios financiers doit permettre de compléter l’analyse et surtout d’en apprécier le niveau de risque.

Quelques indicateurs simples peuvent être mis en place et surtout suivis dans le temps pour en surveiller l’évolution :

  • ratio d’indépendance financière : situation nette / Ressources à long terme (+ emprunts).
    Plus le ratio diminue et plus la structure devient dépendante des financements externes
  • fonds de roulement (en jours) : Fonds de roulement / total des charges d’exploitation × 360 jours. Cet indicateur permet de mettre en lumière la capacité interne de la structure à supporter son fonctionnement par ses propres ressources.
  • capacité d’endettement (en %) : (Emprunts + crédit-bail retraité) / situation nette, donnant une vision de la capacité de la structure à s’endetter ou non davantage.

D’autres ratios peuvent bien entendu être estimés, ils auront toujours le même objectif : prévenir le risque financier et se doter d’une analyse permettant de prendre les décisions nécessaires. À la lumière de l’augmentation des coûts de construction et de la hausse des taux d’intérêt, la remise en cause de certains investissements en raison d’un risque de fragilité financière est une réalité... qui ne pourra être relevée que par une analyse financière anticipée et pertinente.