Il n’est pas rare que des organismes à but non lucratif – associations et/ou fondations – se disputent un héritage lorsque le testament du légataire n’en désigne pas clairement le bénéficiaire, ou encore parce que le prétendu bénéficiaire ne possède pas la capacité pour le recevoir.

C’est généralement devant les prétoires que le litige trouve son issue. L’affaire ayant donné lieu à cet arrêt du 14 avril 2021 n’échappe pas à la règle.

Absence d’opposition du préfet. Une personne décédée en 2012 avait pris soin, de son vivant, de faire établir un testament instituant une fondation vouée à la défense de la cause animale légataire universelle, à charge pour cette dernière de distribuer la moitié de l'héritage à une association ayant le même objet. La fondation a accepté le legs et le préfet de Paris a rendu une décision d’absence d’opposition le 21 novembre 2012. L’article 2 du décret du 11 mai 2007 confère, en effet, un droit d’opposition au préfet à l’acceptation de libéralités faites à des fondations, congrégations et associations ayant la capacité de recevoir des biens à titre gratuit.

Importance de l’affiliation à une fédération. Mais, faisant valoir que l'association ne disposait pas de la capacité juridique pour recevoir le legs, la fondation l’a assignée pour motif que la clause du testament non écrite prévoyait une charge illicite. La fédération à laquelle est affiliée l’association gratifiée est alors intervenue volontairement à l’instance aux fins d’être autorisée à accepter le legs effectué au profit de l’association, à charge pour elle d’en affecter le montant à une action de cette dernière, conformément à la volonté de la testatrice. La cour d’appel d’Agen donne droit à cette demande de la fédération. Ce que conteste la fondation, qui se pourvoit alors en cassation. Elle reproche aux juges d’appel d’avoir considéré comme indifférent le fait que l’association se soit affiliée à la fédération postérieurement au décès de la testatrice. Ces juges ont, en effet, fait rétroagir les effets de l’affiliation, semble-t-il au jour du décès de la testatrice, de telle sorte que, bien qu’inapte à recevoir le legs, l’association pouvait cependant profiter de la capacité de la fédération.

L’affiliation doit être antérieure au décès. La Cour de cassation condamne fermement ce raisonnement et casse l’arrêt d’appel s’appuyant sur les articles 906, alinéa 2, et 911, alinéa 1er, du code civil. Elle précise que, aux termes du premier de ces textes, pour être capable de recevoir par testament, il suffit d’être créé à l'époque du décès du testateur. Selon le second, toute libéralité au profit d'une personne morale frappée d'une incapacité de recevoir à titre gratuit est nulle. Il résulte de la combinaison de ces textes, dont le premier traduit le principe fondamental suivant lequel il ne peut exister de droits sans sujets de droits, que le legs fait à une association dépourvue de la capacité de recevoir une libéralité au jour du décès du disposant est nul.

La Cour de cassation reproche à la cour d'appel de s’être « déterminée au regard de la capacité d'une personne morale à laquelle elle n'avait pas reconnu la qualité de légataire ». L’association ne pouvait donc bénéficier du legs. Il est peu douteux que la cour d’appel de renvoi, à savoir la cour d’appel de Toulouse, attribue à la fondation la totalité de celui-ci.

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel