À la demande d’associations de protection de l’environnement, le tribunal administratif de Paris a condamné l'État pour « inaction climatique ».

C’est historique, ou du moins cela pourrait l’être. Dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler « l’Affaire du siècle », le tribunal administratif de Paris vient de condamner l'État pour « inaction climatique ».

Jugement avant-dire droit. Cette condamnation revêt un aspect essentiellement symbolique puisqu’elle répare le seul préjudice moral des associations de protection de l’environnement requérantes à hauteur d'un euro chacune.

En revanche, le tribunal administratif rejette la demande de réparation du préjudice écologique qu’elles avaient réclamé et se donne deux mois supplémentaires pour statuer sur la question de l'injonction faite à l’État de faire cesser ce préjudice écologique pour l’avenir. Il faut noter, en effet, que le tribunal administratif vient de rendre un jugement « avant-dire droit », qui n’est pas son jugement définitif mais une simple première étape. Le jugement définitif ne sera rendu qu’après un supplément d'instruction de deux mois. Ce n’est qu’une fois qu’il sera rendu que l’on pourra se prononcer sur son caractère ou non « historique ». Il faut surtout attendre l’arrêt que le Conseil d’État doit prochainement rendre dans l’affaire de la pollution de l'air à Grande-Synthe.
CE 19 nov. 2020, n° 427301

Préjudice réparable. Pour les associations requérantes, il s’agit d’un jugement en demi-teinte. Celui-ci rappelle, que, aux termes de l’article 1249 du code civil, la réparation du préjudice écologique, qui est un préjudice non personnel, s’effectue par priorité en nature et « que ce n’est qu’en cas d’impossibilité ou d’insuffisance des mesures de réparation que le juge condamne la personne responsable à verser des dommages et intérêts au demandeur, ceux-ci étant affectés à la réparation de l’environnement ».

Or, pour le tribunal administratif, les associations requérantes ne démontrent pas que l’État serait dans l’impossibilité de réparer en nature le préjudice écologique dont le présent jugement le reconnaît responsable. Il rejette en conséquence la demande de versement d’un euro symbolique en réparation du préjudice écologique, car « sans lien avec l’importance de celui-ci ». Toutefois, ces associations sont bien fondées à demander la réparation en nature du préjudice écologique causé par le non-respect des objectifs fixés par la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre mais l’état de l’instruction ne permet pas au tribunal de déterminer avec précision les mesures qui doivent être ordonnées à l’État à cette fin. De même, les carences fautives de l’État dans le respect de ses engagements en matière de lutte contre le réchauffement climatique portent atteinte aux intérêts collectifs défendus par chacune des associations requérantes. L’État devra de ce fait verser à chacune d’entre elles la somme d’un euro en réparation de leur préjudice moral.

Intervention volontaire à l’instance. Enfin, certaines associations n’avaient pas formulé elles-mêmes d’actions contre l’État mais simplement tenté de se joindre à l’instance préalablement introduite par d’autres. L’intervention de l’une d’entre elles est jugée recevable, car elle a notamment « pour objet de lutter contre les atteintes anthropiques à l’environnement dont l’une des manifestations réside dans la contribution au phénomène du changement climatique ».

Mais une intervention ne peut être admise que si son auteur s'associe soit aux conclusions du requérant, soit à celles du défendeur. Ainsi, est irrecevable une intervention qui présente des conclusions distinctes de celles de l'un ou de l'autre. Par suite, les interventions de deux autres associations, qui demandent la réparation de leur préjudice moral à hauteur d’un euro chacune mais pas celle du préjudice écologique, ne sont pas recevables. En outre, une intervention non motivée n’est pas recevable. Par conséquent, l’association, dont l’intervention au soutien de l’État ne comporte l’énoncé d’aucun moyen et qui, en outre, n’a présenté une intervention motivée que postérieurement à la clôture de l’instruction, n’est pas recevable à intervenir.

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel