
La justice s’est prononcée sur une tentative d’adaptation locale du contrat d’engagement républicain, qui conditionne l’attribution de subventions.
Un conseil municipal approuva les termes d’un contrat d’engagement républicain (CER) d’associations bénéficiant de subventions publiques et décida de conditionner l’attribution desdites aides à sa signature. Une association demanda et obtint l’annulation de la délibération qui approuvait les stipulations du CER selon lesquelles, notamment, les associations avaient obligation « d’adopter en tous points un fonctionnement laïc » et de « s’abstenir de tout prosélytisme », les juges se fondant sur l’atteinte excessive portée à la liberté des associations de manifester leurs convictions religieuses. La ville fit appel.
Intérêt à agir
Bien que la délibération ait un champ d’application territorial limité, l’association à ressort national justifie d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, la décision soulevant des questions qui excèdent les seules circonstances locales, de par leur nature et leur objet – puisqu’il est notamment question de libertés publiques. Le CER issu de la loi dite « Séparatisme » est généralisé à toute association demandant une subvention ou un agrément. Le juge motive ce point par la possibilité, pour la délibération, d’affecter la liberté d’association et la liberté religieuse des associations.
Libertés religieuse, de conscience et d’association
Le juge rappelle ensuite, sur le fondement de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, que la liberté religieuse implique celle de manifester sa religion et de tenter de convaincre son prochain, sans permettre le prosélytisme de mauvais aloi. Citant la loi de 1905 sur la séparation des églises et de l’Etat, la cour souligne qu’une association qui, sans constituer une association cultuelle, a des activités cultuelles peut être aidée par une collectivité territoriale en vue de réaliser un projet qui ne présente pas un tel caractère et qui n’est pas destiné au culte, sous réserve toutefois de justifier d’un intérêt public local et de garantir l’affectation exclusive de la subvention.
Confirmant qu’une personne morale dispose d’une liberté de conscience permettant l’application de l’article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la juridiction estime que le CER résultant de la délibération constitue une ingérence dans la liberté religieuse, les engagements aboutissant à l’abstention de toute manifestation religieuse dans le fonctionnement et les activités des associations concernées.
Le juge poursuit en écartant l’idée que l’association constitue une usagère du service public du seul fait qu’elle perçoit une subvention. Autrement dit et à ce titre, la bénéficiaire n’est pas interdite de prosélytisme ni soumise au principe de laïcité. En sens contraire, la ville n’est pas fondée à soutenir que ledit principe et la loi de 1905 lui interdisent le versement de subvention à des associations dont le fonctionnement ne serait pas conforme audit principe.
Enfin, la cour écarte les moyens relatifs au principe d’égalité et, plus largement, à la liberté d’association, les considérant comme inopérants.
Des éclaircissements en attente
La jurisprudence n’est donc pas encore stabilisée sur le contenu du CER : le contenu est-il intangible car fixé par le pouvoir réglementaire ou peut-il être modifié dans le respect du droit positif ? La cour lyonnaise semble admettre implicitement cette seconde possibilité, encore que les faits de l’espèce ne lui permettent pas de sauver la délibération.
Les collectivités entendant modifier les CER doivent être conscientes du risque contentieux, quelques années pouvant encore s’écouler avant que le Conseil d’État ne tranche, tandis que les associations peuvent être incitées à critiquer les modifications déraisonnables.

Auteur
Juris associations pour le Crédit Mutuel