La Cour administrative d’appel de Bordeaux apporte des précisions sur le champ d’application de la TVA aux associations, notamment sur la notion de distorsion de concurrence.

À compter de l’année 2015, la commune de Chauray a passé des conventions de location avec les associations sportives locales utilisatrices de ses équipements sportifs au titre desquelles elle a perçu un certain nombre de loyers au cours des années 2015 et 2016. Dans le cadre de ces conventions, la commune assumait la maintenance des équipements, les frais d’entretien et réparations, ainsi que l’entretien des locaux. Sur la même période, la commune a également conclu des conventions d’objectifs avec ces mêmes associations afin de soutenir financièrement leurs actions par le biais de subventions, étant précisé que certaines de ces subventions correspondaient au montant du loyer perçu pour la mise à disposition des équipements.

En 2017 et 2018, la commune a déposé des demandes de remboursement d’un crédit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) relatif à ces équipements pour un montant total de 278 282 euros. L’administration fiscale a rejeté ces demandes, estimant que l’activité en cause de location de salles et d’équipements sportifs par la commune est hors du champ d'application de la TVA. L’arrêt signalé confirme la position de l’administration.

Assujettissement, autorité publique et distorsion de concurrence

Après avoir rappelé les textes applicables en la matière1, les magistrats bordelais se fondent sur un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne2 aux termes duquel le non-assujettissement à la TVA prévu en faveur des personnes morales de droit public, qui déroge à la règle générale de l’assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives tenant, d’une part, à ce que l’activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu’autorité publique et, d’autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d’une certaine importance.

Analyse des conditions

La condition selon laquelle l’activité économique est réalisée par l’organisme public en tant qu’autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la CJUE, lorsque l’activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public. Ainsi, l'activité en cause doit être exercée dans des conditions juridiques différentes de celles des opérateurs économiques privés. Tel est le cas, notamment, lorsque sont mises en œuvre des prérogatives de puissance publique, lorsque l’activité est accomplie en raison d’une obligation légale ou dans le cadre d'un monopole ou encore lorsqu'elle relève par nature des attributions d'une personne publique. Cette condition peut également être regardée comme remplie, si la législation de l’État membre le prévoit, lorsque l’activité exercée est exonérée en application, notamment, de l'article 132 de la directive TVA, lequel vise « certaines prestations de services ayant un lien étroit avec la pratique du sport ou de l’éducation physique, fournies par des organismes sans but lucratif aux personnes qui pratiquent le sport ou l'éducation physique ». Or, il résulte de l’article 256 B du CGI que la France a fait usage de cette possibilité – cet article prévoit que « les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la TVA pour l'activité de leurs services sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence [...] ».

Ainsi, eu égard à ses caractéristiques et aux modalités de son exercice, et même si le montant des subventions versées n’est pas entièrement corrélé aux loyers perçus, l’activité de location de ses équipements sportifs, laquelle est au nombre des activités visées par l’article 256 B du CGI, est réalisée par la commune en tant qu’autorité publique. C’est donc à bon droit que l’administration a considéré que ladite activité est hors du champ d’assujettissement à la TVA, d'autant qu'il n'est pas contesté que la seconde condition exigée, à savoir l’absence de distorsion de concurrence d’une certaine importance, est en l’espèce remplie.

1 : Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 nov. 2006 relative au système commun de TVA (art. 13 et 132) et les articles 256 A et B du code général des impôts (CGI)
2 : CJUE 29 oct. 2015, affC-174/14

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel