Associations et fondations : l’heure de la simplification

L’ordonnance portant simplification du régime des associations et des fondations du 23 juillet 2015 1 modifie substantiellement le fonctionnement et l’administration de ces structures. Genèse.

Fruit du « choc de simplification » pour les associations et les fondations, cette ordonnance consacre un grand nombre de mesures novatrices. Des dispositions générales (déclaration, agrément...) au financement (subvention, appel public à la générosité...) en passant par des dispositions spécifiques aux associations et fédérations sportives, de nombreux domaines sont impactés.

Rétrospective

Rétrospective

La loi relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) du 31 juillet 2014 avait habilité le gouvernement à prendre par ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi afin de simplifier les démarches administratives des associations et fondations 2.

Fort de cette prérogative, le Premier ministre avait alors confié en avril 2014 au député Yves Blein une mission de réflexion sur cette simplification.

Mission qui s’est achevée en octobre 2014 par la publication du rapport « 50 mesures de simplification pour les associations ». Certaines de ces mesures réclamées depuis longtemps par le secteur associatif ne pouvaient être que soutenues :

  • simplification du dossier de demande de subventions pour celles d’un montant inférieur au seuil de minimis des contraintes européennesamélioration de la gestion de la fiscalité par les associations en définissant ;
  • non-diminution des subventions accordées à une association au prétexte qu’elle a généré un excédent l’année précédente, dès lors que celui-ci est raisonnablecertaines notions telles que le caractère philanthropique ou le cercle ;
  • amélioration de la visibilité des associations sur les financements alloués au-delà de la première année en cas de convention pluriannuelle ;
  • mise en place d’un numéro d’identité unique tout au long de la vie de l’associationrestreint de personnes.... ;
  • amélioration de la gestion de la fiscalité par les associations en définissant certaines notions telles que le caractère philanthropique ou le cercle restreint de personnes...

Si l’ordonnance est relativement en retrait par rapport aux propositions, il convient de saluer l’effort de simplification réalisé sous l’impulsion du député Yves Blein, et notamment la suppression du registre spécial des associations... Un registre souvent ignoré ou confondu avec le registre des délibérations. Mais, que l’on ne s’y trompe pas, les obligations déclaratives subsistent. En outre, cette suppression ne veut pas pour autant dire que les associations peuvent se libérer de la rédaction et de la conservation des procès-verbaux d’assemblées générales et de conseils d’administration. Ces derniers constituent des preuves tout en permettant de conserver la mémoire des décisions prises au cours de ces instances.

Enfin, l’instauration d’un dossier homogène de demande de subvention, quelle que soit l’autorité administrative de financement, représente une bonne mesure.

1 Ord. n° 2015-904 du 23 juill. 2015, JO du 24.
2 L. n° 2014-856 du 31 juill. 2014, JO du 1er août, art. 62.

Administration et fonctionnement : ce qui change

Suppression du registre spécial, prise en compte du rôle de greffe des associations par d’autres services que les bureaux des associations, modification du droit de préemption urbain... l’ordonnance du 23 juillet 2015 apporte de nombreuses simplifications au fonctionnement et à l’administration des associations et fondations.

Administration et fonctionnement : ce qui change
  • Déclaration d’association
    Le rôle des greffes des associations est assumé par d’autres services que les bureaux des associations des préfectures ou des sous-préfectures.
    La déclaration d’association est en effet réalisée auprès du « représentant de l’État dans le département ».
  • Registre spécial
    La suppression de l’obligation légale de tenir un registre spécial au siège social de l’association est entérinée. Ce document avait vocation à consigner les modifications statutaires et les changements survenus dans l’administration de l’association ainsi qu’à être présenté à la demande des autorités administratives ou judiciaires. Par conséquent, la sanction liée au non-respect de cette obligation – 1 500 euros d’amende pouvant atteindre 3 000 euros en cas de récidive – est également enterrée. Pour rappel, la loi Warsmann 3 avait déjà supprimé en 2012 les dispositions qui permettaient de prononcer la dissolution judiciaire de l’association en cas de non-respect de l’obligation de tenue du registre spécial.
  • Agrément
    Objet d’intérêt général, fonctionnement démocratique, transparence financière : les trois critères relevant du « tronc commun » d’obtention d’agrément restent sensiblement les mêmes. Cependant, le champ d’application du tronc commun des agréments est désormais limité aux agréments délivrés « par l’État ou ses établissements publics ». Par ailleurs, le texte accorde explicitement aux associations relevant du code civil local d’Alsace-Moselle la possibilité de bénéficier de ces agréments.
  • Libéralités
    Le pouvoir d’opposition du préfet quant à l’acceptation d’une libéralité par les associations et fondations reconnues d’utilité publique, ainsi que par les associations dont la mission a été reconnue d’utilité publique et les fondations relevant du droit civil local d’Alsace-Moselle est supprimé.

Dissolution des associations Alsace-Moselle

Le pouvoir a priori de l’autorité administrative contre l’inscription d’une association régie par le code civil local applicable en Alsace-Moselle disparaît. Toutefois, sur saisine de l’autorité administrative compétente ou sur requête du ministère public ou de tout intéressé, la dissolution pourra être prononcée « si l’association est fondée sur une cause ou en vue d’un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes moeurs ou qui aurait pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à la forme républicaine du Gouvernement ». Dans ce cas de figure, la dissolution est prononcée par le tribunal de grande instance.

En définitive, le régime de dissolution des associations « Alsace-Moselle » est calqué sur celui des associations « loi 1901 ».

  • Droit de préemption urbain
    Le régime relatif au droit de préemption urbain applicable aux aliénations à titre gratuit d’immeubles ou d’ensembles de droits sociaux change. Ne tombent désormais plus sous le coup du droit de préemption urbain : les aliénations à titre gratuit effectuées au profit des fondations, des congrégations, des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités, et dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, des établissements publics du culte ainsi que des associations inscrites de droit local.
  • Transformation
    Une fondation dotée de la personnalité morale peut désormais être transformée en fondation reconnue d’utilité publique (FRUP) sans donner lieu à dissolution ni à création d’une personne morale nouvelle. À noter que cette possibilité avait déjà été accordée par la loi ESS aux associations et fonds de dotation.

Associations et fédérations sportives

Les associations sportives affiliées à une fédération sportive agréée bénéficient désormais de l’agrément de leur fédération.

En d’autres termes, l’affiliation vaut agrément.

Par ailleurs, les procédures de reconnaissance d’utilité publique (RUP) des fédérations sportives agréées sont supprimées, ces dernières bénéficiant de plein droit de la RUP.

3 L. n° 2012-387 du 22 mars 2012, JO du 23, art. 127 supprimant l’article 7, alinéa 2 de la loi du 1er juillet 1901.

Financement et comptabilité : des mesures novatrices

Matières hautement importantes pour les associations et les fondations, le financement et la comptabilité font l’objet de profondes modifications. La vague de simplification impulsée par les différents rapports de mission semble donc avoir porté ses fruits

Financement et comptabilité : des mesures novatrices
  • Formulaire unique de subvention
    De par leur complexité et la multiplicité des dossiers, les demandes de subvention constituaient l’un des principaux sujets de préoccupation pour les associations. Le rapport de mission du député Yves Blein, soutenu sur ce point par le rapport Bocquet-Dumas, appelait de ses voeux l’instauration d’un dossier de demande de subvention unique.
    En ce sens, l’ordonnance prévoit que toute demande de subvention déposée par une association auprès d’une autorité administrative ou d’un organisme chargé de la gestion d’un service public industriel et commercial (SPIC) devra désormais être effectuée par le biais d’un formulaire unique. Un décret viendra en préciser les caractéristiques.
  • Appel public à la générosité
    La notion d’appel à la générosité publique est rebaptisée en « appel public à la générosité ». En outre, les critères de déclaration préalable en vue d’un tel appel sont modifiés : la notion de « campagne menée à l’échelon national soit sur la voie publique, soit par l’utilisation de moyens de communication » disparaît. Dorénavant, c’est le dépassement d’un seuil de collecte – au cours de l’un des deux exercices précédents ou de l’exercice en cours – qui conditionne l’obligation de déclaration préalable. Ce seuil, qui sera fixé par décret, devrait vraisemblablement être de 153 000 euros. Il s’agit en effet du montant déclenchant actuellement l’application de certaines obligations comptables aux associations.

Attention

La suppression de la notion de « campagne menée à l’échelon national » a une incidence directe sur les campagnes menées dans un cercle restreint de personnes et/ou à un niveau local (jusqu’à présent non soumises à la déclaration préalable), comme le font notamment les fondations abritées et les fondations d’entreprises, dès lors qu’elles collectent des sommes supérieures au seuil (probablement 153 000 euros).

  • Compte d’emploi des ressources
    L’établissement d’un compte d’emploi des ressources (CER) collectées auprès du public ayant notamment vocation à préciser l’affectation des dons par type de dépense est désormais conditionné au dépassement d’un seuil de ressources collectées. Ce seuil, qui sera fixé par décret, devrait, comme pour la déclaration préalable d’appel public à la générosité, être établi à 153 000 euros. Sur le sujet, il est à noter qu’un référé de la Cour des comptes du 5 mai 2015 et publié le 21 juillet 2015 a conclu que le CER n’assurait pas toujours une transparence financière suffisante. Sa complexité en fait, selon elle, un outil peu compréhensible pour un non-spécialiste et ne permettant pas de comprendre les évolutions d’une année à l’autre. En conclusion, la Cour a recommandé de simplifier le CER et de faire valider les documents de synthèse destinés à la communication par le commissaire aux comptes.

Attention

La Cour des comptes reste compétente pour le contrôle de tout organisme faisant appel public à la générosité. Seules les associations collectant de faibles montants (très probablement 153 000 euros), même auprès d’un large public, échappent à ce contrôle.

  • Comptabilité des associations cultuelles
    Les modifications opérées par l’ordonnance sur la loi du 9 décembre 1905 régissant le fonctionnement des associations cultuelles touchent les aspects comptables desdites structures. Tout d’abord, l’obligation de tenir un état des recettes et des dépenses ainsi qu’un compte financier disparaît. En revanche, l’obligation de dresser un état inventorié des biens meubles et immeubles n’est pas retouchée et reste donc d’actualité.
    Ensuite, la procédure de transfert des biens cultuels lors de la dissolution d’une association est simplifiée. Notamment, la nécessité d’obtenir un décret rendu en Conseil d’État est remplacée par des délibérations concordantes des associations ou établissements concernés.
    Enfin, les contraintes liées à la constitution d’une réserve financière sont allégées : les dispositions relatives à l’encadrement du montant de cette réserve sont ainsi supprimées.

En conclusion, les dispositions de l’ordonnance ont acté de réelles simplifications pour le fonctionnement et l’administration des associations et des fondations. Il reste à espérer que cet élan se poursuive notamment en matière fiscale.

Auteur

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