Regroupement - Dusion d'associations : Quelle démarche adopter ?

Les associations rencontrent actuellement des difficultés de natures différentes, les obligeant à réinventer leur mode de fonctionnement.

Une des difficultés est économique. La baisse continue des subventions de l’Etat, conjuguée au contexte économique tendu de ces dernières années entraînant une diminution des financements des collectivités, oblige les associations à trouver de nouveaux modèles économiques pour pérenniser leurs activités.

Deux solutions sont envisageables : rechercher de nouvelles ressources ou rationaliser sa gestion par la réduction de charges et la réalisation d’économies d’échelle.

Par ailleurs, 66 % des associations interrogées dans l’étude Deloitte-CNRS indiquent être confrontées à la problématique de renouvellement des instances dirigeantes. Si le bénévolat ne faiblit pas en France, il est plus difficile de trouver des personnes qui souhaitent s’investir dans la gouvernance des associations, compte tenu du temps nécessaire et des responsabilités engagées.

L’étude fait aussi apparaître que beaucoup d’associations ont du mal à recruter des compétences en interne, soit par un manque de ressources suffisantes, soit par un manque de candidat.

Enfin, dans certains secteurs d’activité, et plus particulièrement le secteur médico-social, on constate un nombre important de regroupements, généralement fortement encouragés par les financeurs, dans un souci de rationalisation de leurs financements.

Regroupement - Dusion d’associations : Quelle démarche adopter ?

La coopération entre asso-ciations, la mutualisation de moyens et/ou la fusion sont des réponses possibles aux problèmes économiques, de gouvernance ou de profes-sionnalisation des équipes dès lors que ces démarches sont préalablement réfléchies et organisées.

La coopération est l’action de prendre part et de concourir à une œuvre commune. Elle relie des acteurs à travers un ensemble de relations définies, afin de créer une valeur ajoutée en organisant des complémentarités entre associations.

La mutualisation est une forme de coopération. Elle est l’action de mise en commun principalement des moyens. On peut mutualiser (partager) les compétences d’un salarié, les coûts d’un investissement, un service d’achats, par exemple.

La fusion, quant à elle, est le stade ultime de la coopération puisqu’il s’agit d’un mariage à vie, avec transfert de tout ou partie de l’activité, du patrimoine et très souvent disparition d’une des associations.

Comment réaliser une mutualisation ou une fusion réussie ? Vous trouverez dans cette lettre, quelques éléments de réponse et de présentation des démarches.

Quelle démarche adopter lorsqu’on souhaite mutualiser ?

Quelle démarche adopter lorsqu’on souhaite mutualiser ?

Pour une mutualisation réussie, les étapes suivantes nous semblent essentielles.

1. Définir les objectifs et les attentes de chaque association.

La mise en commun de moyens, qu’ils soient matériels, humains ou de services, peut répondre à un ou plusieurs objectifs, parfois différents d’une association à l’autre :

  • rationaliser des coûts en les partageant ou en permettant une taille plus importante de commande, et donc une réduction de prix,
  • accéder à du personnel qualifié qu’il aurait été difficile de financer seul,
  • optimiser des investissements lourds à plusieurs,
  • pouvoir répondre à la complexité des accompagnements d’usagers par une multidisciplinarité des compétences,
  • favoriser le décloisonnement des associations sur un territoire et éviter ou supprimer l’isolement de petites associations.

2. Connaître les membres du groupement avant de s’engager.

Pour cela il convient :

  • de s’assurer que les valeurs qui vous semblent essentielles sont partagées,
  • d’avoir confiance dans les autres membres du groupement,
  • d’être solidaire,
  • d’échanger les données financières de chaque membre. Rien n’est plus désagréable de s’apercevoir, le groupement créé, qu’un des membres est défaillant, reportant la charge sur les autres membres.

3. Evaluer préalablement le coût de la mutualisation pour savoir si chaque association membre peut y faire face, notamment lorsqu’il s’agit d’un investissement lourd.

4. Définir la répartition des charges entre les membres et leur mode de facturation. La détermination du montant que chaque association aura à régler doit être estimée en amont de la mutualisation afin qu’elle connaisse les impacts sur ses résultats et sa trésorerie.

5. S’assurer que les modalités de refacturation ne vont pas entrainer une fiscalisation à la TVA des opérations réalisées par le groupement. Il est nécessaire de prévoir une refacturation à l’euro - l’euro.

6. Se rencontrer régulièrement pour faire avancer les projets, évaluer les objectifs du groupement et réaliser un point régulier sur les coûts et les impacts financiers.

La mutualisation, sous quelle forme ?

La mutualisation, sous quelle forme ?

Plusieurs formes juridiques peuvent être utilisées pour sa mise en place.

La convention de partenariat

Il s’agit d’un contrat entre deux ou plusieurs associations, définissant le péri-mètre des moyens mis en commun, le mode de répartition de la charge entre associations ou le mode de partenariat si cela ne concerne pas des moyens, les conditions pour sortir du partenariat...

Les autres formes possibles pour la mutualisation nécessitent la création d’une personne morale distincte (sous forme associative ou autre) pour gérer les activités commune de ses membres.

L’association d’associations

Chaque association est membre de l’association « mère ». Compte tenu de la liberté de rédaction des statuts et du règlement intérieur, cette association peut être gérée selon les volontés de ses membres. Cela demande toutefois une gouvernance supplémentaire.

Le Groupement d’Employeurs (GE)

Il sert uniquement à mettre à disposition du personnel entre plusieurs asso-ciations, les adhérents pouvant ainsi trouver une réponse à leurs besoins en termes de compétences et d’emplois à temps partiel ou saisonniers. Le salarié est embauché à temps plein par le GE, travaille pour plusieurs associations qui signent des conventions d’utilisation avec le GE, précisant le volume horaire de travail annuel, semestriel ou mensuel et indiquant le coût de l’intervention. Pour constituer un GE, il faut établir des statuts, un règlement intérieur et procéder aux différentes déclarations administratives.

Attention

Les membres du Groupement d’Employeurs sont solidairement responsables de leurs dettes à l’égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires.

Les autres groupements

On peut citer le Groupement d’Intérêt Economique (GIE), le Groupement d’In-térêt Public (GIP) et les Groupements de Coopération du Secteur Sanitaire et Médico-social (Groupement de Coopération Sanitaire, Groupement de Coo-pération Social et Médico-social). Chaque groupement a ses caractéristiques juridiques propres.

Fusion : les schémas juridiques

Fusionner, c’est « ne faire qu’un » !

France Active a édité un guide présentant la démarche de la fusion d’associations en utilisant la terminologie liée au mariage aux différentes phases de préparation et de réalisation d’une fusion : la rencontre, les fiançailles, le mariage et la vie de couple.

Nous n’aborderons que les schémas juridiques de fusion. Deux possibilités :

La fusion-absorption

La fusion-absorption
Association A
« absorbée »
L’ensemble du patrimoine de A est transféré dans B.
A est ensuite dissoute.
B reçoit l’ensemble du patrimoine et des obligations de A.
B est obligé de poursuivre les contrats de A, y compris les contrats de travail.
B doit régler l’ensemble des dettes transférées de A.
Association B
« absorbante »

La fusion-absorption est plus difficilement acceptée sur le plan psycho-logique. Les dirigeants et salariés de l’association absorbée ont souvent le sentiment qu’ils ne survivront pas à cette opération.

Il est donc nécessaire de bien la préparer et de communiquer suffisamment en amont.

La fusion-création

Une nouvelle association absorbe les associations fondatrices.

La fusion-création
Association A
« absorbée »
Association B
« absorbée »
L’ensemble des patrimoines de A et B est transféré dans C.
 
Association C
« absorbante »
Les 2 associations sont dissoutes.
C reprend l’ensemble des droits et obligations ainsi que l’ensemble des contrats de A et B.

La fusion-création nécessite de créer une nouvelle association avant de mener l’opération de fusion.

Un avantage de la fusion-création réside souvent dans le sentiment d’une meilleure égalité entre les deux associations, puisque la gouvernance de l’association, créée à cet effet, a été pensée de façon à ce que chacun y retrouve sa place.

A ce jour, il n’existe pas de législation juridique spécifique aux fusions d’associations. Les opérations juridiques sont calquées sur le droit afférent aux entreprises commerciales (sauf pour le régime fiscal de faveur, pour lequel une instruction fiscale sera prochainement publiée). Afin de remédier à ce vide, l’article 41 du projet de loi sur l’ESS prévoit une modification de la loi de 1901, avec l’obligation d’un traité de fusion et la nomination d’un commissaire aux apports pour les fusions importantes.

Respecter la démarche, clé de réussite d’une fusion

Une opération de fusion est complexe dans son organisation car il faut intégrer les inquiétudes des acteurs de chaque association (les dirigeants, les salariés, les bénévoles, les usagers, les créanciers, les financeurs, la banque...) et les conduire au changement d’identité, de management, de fonctionnement, de méthodes...

Il convient d’anticiper le plus possible, car une fusion exige du temps de préparation et le respect de certaines étapes qui nous semblent être incontournables :

  • 1. Chaque association doit préalablement réfléchir en interne à ses valeurs « non négociables », celles qui ne pourront pas être « englouties » dans la fusion. Cela évitera des frustrations persistantes.
  • 2. Un temps important doit être consacré à se connaître : échanges sur les valeurs, le projet, les modes de fonctionnement, les données financières...
  • 3. La réalisation d’une balance des avantages et inconvénients sera utile pour que chacun y trouve un intérêt et une place.
  • 4. Un projet institutionnel commun et partagé par tous (membres, dirigeants, salariés) doit être élaboré. Cela nécessite un climat de confiance, comprenant honnêteté et transparence.
  • 5. Il est impératif de définir une nouvelle gouvernance acceptée par l’ensemble des dirigeants de l’association absorbée.
  • 6. Nous conseillons de mettre en place une gestion de projet si l’association a des salariés.
  • 7. Ne pas oublier l’audit des comptes de « l’absorbée », permettant de valider la valeur du patrimoine transmis, et de s’assurer de l’évaluation des dettes et créances. L’audit économique et financier permettra égale-ment de définir les coûts de la fusion ainsi que de détecter d’éventuels coûts cachés (indemnités de départ à la retraite non provisionnées, litiges non mentionnés...).
  • 8. Un budget prévisionnel de « l’absorbante » après fusion est indispensable afin de bien mesurer les impacts financiers (plus d’activité pouvant nécessiter un besoin de trésorerie plus important, dépassement de certains seuils en cas de salariés...).
  • 9. Il sera alors possible d’établir le traité de fusion et de faire accepter l’opération de fusion par l’organe délibérant de « l’absorbante », et de constater la dissolution par l’organe délibérant de « l’absorbée ».

La communication interne et externe est importante : un manque de communication est préjudiciable pour l’acceptation des différents acteurs concernés.

En conclusion, la fusion est souvent décidée pour des raisons écono-miques et des économies d’échelle. Toutefois, par expérience, 1 + 1 ne fait pas nécessairement 2, en raison de possibles franchissements de seuil, d’éventuels coûts liés à une nouvelle organisation...

Une fusion réussie dépend beaucoup de la volonté des dirigeants, des salariés, et de tous les partenaires concernés, sans oublier la prise en compte de l’histoire et de la culture de chaque association.

Bon à savoir

Financement privé du secteur associatif

Le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) rappelle dans son rapport définitif du 13 mars 2014 « l’impérieuse nécessité » de développer le financement privé des associations et préconise un certain nombre de mesures.

Loi Economie Sociale et Solidaire

Le projet de loi, examiné le 13 mai en 1ère lecture à l’Assemblée nationale, comporte des dispositions à destination des associations, principales composantes de ce secteur : à suivre.

Auteur

Acteur majeur de l’expertise comptable en France, In Extenso accompagne au quotidien plus de 4 000 associations. www.inextenso-associations.com