Circulaire Valls : des relations apaisées

Circulaire Valls : des relations apaisées

Instaurer de nouvelles relations entre les pouvoirs publics et les associations. Tel est à la fois l’intitulé et l’objet de la circulaire du 29 septembre 2015 dite aussi circulaire « Valls ».

Décryptage et bilan d’étape sur un texte d’apaisement qui entend à la fois sécuriser et clarifier l’un des modes privilégiés du financement associatif : la subvention.

Contexte

Depuis le milieu des années 2000, le secteur associatif a dû composer avec de nouvelles règles de financement public. Les collectivités territoriales en particulier ont progressivement substitué la commande publique au subventionnement dans leurs relations avec les associations pour des raisons essentiellement juridiques. De ce fait, la relation en a été changée avec le sentiment pour les associations d’être davantage un prestataire qu’un partenaire.

Si la circulaire « Fillon » du 18 janvier 2010 a voulu relancer la dynamique en essayant de clarifier le cadre juridique du subventionnement, les chiffres ont montré une réalité différente. Selon une étude sur le paysage associatif français (Juris éditions, 2013), de 2005 à 2011, les subventions ont seulement représenté 25 % du financement des associations, tandis que dans le même temps, les marchés publics ont augmentés de plus de 70 % avec pour conséquence une disparition de 9 % des associations de taille moyenne mal armées face aux contraintes juridico-administratives de la commande publique.

Pour remédier à cette situation et renouer un partenariat entre secteur public et associations, plusieurs outils ont été mis en place durant l’année 2014 d’un point de vue tant politique (charte d’engagements réciproques entre l’État, les représentants des collectivités territoriales et les représentants du monde associatif) que juridique avec pour la première fois une définition légale de la notion de subvention retenue par la loi ESS du 31 juillet 2014. Cette situation doit être corrélée avec la réforme territoriale. En réorganisant les compétences des différents échelons et en regroupant certaines régions, elle perturbe au moins pendant un temps les habitudes de subventionnement des associations.

Mobilisation de l’action interministérielle

Pour accompagner au mieux ces changements, la circulaire Valls invite l’État lui-même via ses ministères à désigner un correspondant chargé de la vie associative. Les préfets doivent promouvoir auprès des collectivités territoriales l’adoption de chartes locales. Comme relais sont nommés par les préfets des délégués régionaux et départementaux à la vie associative dotés d’un rôle interministériel et en charge de nouvelles missions d’information, de formation, d’animation et d’accompagnement des acteurs.

Établir des relations partenariales

Définie par la loi, la subvention voit son régime sécurisé par la circulaire Valls et détaillé de façon pratique dans un guide du ministère chargé de la vie associative du 16 mars 2016. En assouplissant par ailleurs certaines démarches, ces outils participent à l’établissement de relations partenariales entre les collectivités et les associations dont les bonnes pratiques sont recensées par ce guide.

Clarifier les conditions d’attribution de la subvention

Établir des relations partenariales

La circulaire revient surtout sur la distinction entre subvention et commande publique en distinguant mieux ce qui participe d’une logique concurrentielle de ce qui n’en ressort pas. Elle explique également l’impact des règles européennes sur le processus de subvention.

  • Mieux distinguer subvention et commande publique
    La circulaire insiste sur le fait que l’association est, par le bais d’une demande de subvention, un partenaire et non un prestataire qui répond à une commande d’une collectivité.
    À ce titre, l’attribution d’une subvention ne doit pas avoir pour objet de répondre à un besoin propre exprimé au préalable par l’autorité publique. De plus, il ne doit pas y avoir pour l’association de contrepartie économique (prix ou rémunération d’une prestation individualisée).
    Les associations seront séduites de voir que le guide milite pour privilégier la subvention. Outre le choix politique, des raisons pratiques militent en faveur de ce mode de financement des associations dont un coût moindre (15 à 20 % moins cher qu’un marché public) et moins de risques contentieux que la commande publique.
  • Impact des règles européennes sur le processus de subvention
    Les associations bénéficient d’une nouvelle interprétation de la réglementation européenne dissociant mieux (grâce à des critères se rapprochant de la règle fiscale des « 4P ») les services d’intérêt économiques général (SIEG) des services d’intérêt général non économiques (SIGNE). Le fait pour une association d’être un SIGNE (structure n’ayant pas une activité économique), la soustrait au régime des aides d’État. Cela facilite l’établissement de la convention de subventionnement selon un modèle simplifié (annexe 2 de la circulaire) au contraire des associations assimilées à des entreprises qui devront passer, pour des subventions d’un montant supérieur à 500 000 € sur 3 ans, par un modèle plus complexe de conventionnement (annexe 3 de la circulaire).

Assouplir certaines démarches du processus de subvention

Tant la circulaire que le guide d’usage visent à assouplir en faveur des associations certaines modalités de la demande de subvention, d’instruction de la demande ou encore du suivi de la subvention.

  • Modalités adaptées de la demande
    La circulaire Valls a prévu une nouvelle version des « appels à projets » à travers le « recueil d’initiatives associatives », venant en complément des autres modalités de demandes de subvention auprès de l’autorité publique. Il permet à la collectivité locale de définir ses orientations et ses objectifs généraux puis aux associations de proposer des projets dans ce cadre correspondant aux attentes des habitants. Le guide insiste sur le caractère non concurrentiel de cette démarche.
  • Instruction de la demande de subvention
    L’association peut désormais intégrer les coûts et les salaires antérieurs à la décision d’attribution lorsque l’action a déjà commencé ou doit être réalisée de façon continue.
    Elle peut également constituer un dossier permanent mis à jour et comportant les pièces essentielles sous une forme dématérialisée, sans avoir à fournir un dossier complet pour chaque demande de subvention.
    Attribution de la subvention L’association qui doit conclure une convention d’objectifs dès lors que le financement est supérieur à 23  000 €, est invitée à s’inscrire dans une durée pluriannuelle plutôt qu’annuelle. Elle a la possibilité d’intégrer un excédent «  raisonnable  » de gestion lui permettant de se constituer ou de renforcer ses fonds propres.

Bon à savoir

Le formulaire unique de demande de subvention est en libre accès sur le serveur de délivrance des formulaires www.service-public.fr sous le numéro « Cerfa » 12156*04.

Sa notice explicative porte le numéro « Cerfa » 51781#01.

  • Attribution de la subvention
    L’association qui doit conclure une convention d’objectifs dès lors que le financement est supérieur à 23 000 €, est invitée à s’inscrire dans une durée pluriannuelle plutôt qu’annuelle. Elle a la possibilité d’intégrer un excédent « raisonnable » de gestion lui permettant de se constituer ou de renforcer ses fonds propres.
  • Suivi de la mise en oeuvre
    L’évaluation, distincte du contrôle qui oblige l’association à communiquer certains éléments à la collectivité pour s’assurer de l’utilisation conforme de la subvention, est destinée à apprécier son efficacité. L’association la coréalise, de manière participative, avec l’administration territoriale et non de façon unilatérale comme cela pouvait être le cas auparavant.

Intégrer de nouvelles règles de financement

L’effort de clarification des relations entre les associations et les collectivités territoriales initié par la circulaire Valls et le guide d’usage de la subvention s’est accompagné d’une double réforme : de la commande publique d’une part, territoriale de l’autre.

Les associations confrontées aux règles de la commande publique

Les associations confrontées aux règles de la commande publique

Bien que les associations ne soient pas en principe des entreprises au sens marchand du terme, elles peuvent être soumises dans certains cas à une logique concurrentielle délimitée dans son champ et ses modalités par la réforme de la commande publique.

  • Unification des règles de mise en concurrence
    La réforme de la commande publique initiée par deux ordonnances de 2015 (marchés publics) et de 2016 (contrats de concession) unifie les règles de mise en concurrence existant d’une part pour les associations de l’autre pour les collectivités. Jusqu’alors, les associations en leur qualité d’acheteuse pouvaient être soumises à des règles proches quoique différentes de celles applicables aux collectivités territoriales. Désormais, ce sont les mêmes règles qui s’appliqueront aux unes et aux autres.
  • Relations intégrées de l’association et de la collectivité
    Par ailleurs, la réforme codifie les règles jusque-là jurisprudentielles concernant les relations des associations intégrées aux collectivités qualifiée de relations de quasi-régie (ou encore « in house »).
    La collectivité est dispensée d’engager une procédure de mise en concurrence lorsqu’elle exerce sur l’association un contrôle analogue à celui exercé sur ses propres services et que cette association réalise l’essentiel de son activité avec cette collectivité.
  • Contrats passés par une association subventionnée
    Si les contrats de subvention sont bien exclus de la commande publique, les contrats passés par une association ellemême subventionnée à plus de 50 % par une collectivité territoriale peuvent être soumis, sous certaines conditions, à la plupart des règles de la commande publique. La reconnaissance de la spécificité associative est en revanche admise avec par exemple la possibilité de réserver des contrats publics aux entreprises de l’économie sociale et solidaire et à des structures équivalentes.

L’impact de la réforme territoriale sur le financement des associations

La réforme territoriale (loi MAPAM de 2014, loi sur les régions et loi NOTRe de 2015) n’affecte pas en soi les masses globales de financement (financements locaux dans le budget d’une association représentant environ 27 % du budget d’une association). Ce sont en revanche les modalités de montage qui sont modifiées.

  • Réforme des structures et nouveaux partenaires
    La réduction du nombre de régions (passant de 22 à 13) peut avoir certains effets sur la recherche de financement des associations en amenant à établir de nouveaux contacts.
    Par ailleurs, certains retards liés au regroupement des régions peuvent engendrer des difficultés de trésorerie pour certaines associations. L’impact pour les structures associatives doit toutefois être relativisé au regard de la part de subventionnement régional dans leur budget (seulement de 3,5 %).
    L’amplification du processus d’intégration des communes à des intercommunalités et le changement d’échelle de ces dernières risquent d’avoir un retentissement plus significatif, compte-tenu de la proportion plus grande des subventions communales dans le financement des associations (11,5 %).
    Enfin, la création de la métropole (nouvelle structure intercommunale) compétente notamment en matière de politique de la ville, va amener les associations à rencontrer d’autres partenaires sur des territoires parfois équivalents à ceux du département.
  • Nouvelle articulation des compétences territoriales
    La suppression de la clause générale de compétence des échelons départementaux et régionaux ainsi que la redistribution des compétences vont amener les collectivités territoriales à réorienter les subventions accordées aux associations.
    Même si cette clause permettait de croiser les financements et de ne pas dépendre d’une seule collectivité, les possibilités d’actions communes des différents échelons (compétences partagées dans plusieurs domaines, chef de filât, délégation conventionnelle de compétences...) corrigeront probablement les éventuels problèmes engendrés par cette redistribution des compétences.
Guide d’usage de la subvention

Guide d’usage de la subvention

Edité par le Ministère la Ville, de la Jeunesse et des Sports (mars 2016)

 

Auteur

Le bimensuel des organismes sans but lucratif et de leurs secteurs d’activité depuis plus de 25 ans. Plus d’informations sur www.juriseditions.fr