La mise en place de nouvelles règles comptables et la nouvelle présentation des comptes annuels pour les associations et fondations 1 ne va pas faciliter la vie des banquiers, analystes et financeurs.

En effet, là où il était relativement simple de passer du bilan comptable au tableau de financement, il deviendra nécessaire de procéder à des retraitements de plus en plus complexes lorsque les nouvelles règles comptables seront mises en œuvre 2. Et à condition que les informations nécessaires soient fournies dans l’annexe aux comptes. Clé de voute de l’analyse financière d’un organisme sans but lucratif, la détermination des fonds propres qui jusqu’alors pouvait s’obtenir aisément à la simple lecture du haut de bilan passif ne pourra désormais être appréhendée, dans certaines situations, qu’après plusieurs reclassements et retraitements.

Commentaires sur les principaux changements.

Comment déterminer les fonds propres de votre association ?

Les fonds propres de l’association sont composés des éléments statutaires d’origine correspondant au patrimoine apporté lors de sa création. Selon que les apports sont assortis d’un droit de reprise ou non, on fera la distinction pour déterminer la qualité d’appartenance définitive ou non de ces apports détenus pour l’accomplissement de son objet. La clause relative au droit de reprise devra être suffisamment analysée pour en apprécier le caractère volatile. Mais bien souvent, il n’est prévu d’exercer ce droit qu’en cas de dissolution de l’association ou fermeture d’une activité.

Pendant la vie de l’association, ses fonds propres seront enrichis au moyen de deux sources différentes :

  • de nouveaux apports, la perception de dons, donations et legs dès lors que cette dernière est habilitée à les recevoir ; ou encore, de subventions publiques affectées à des investissements ;
  • d’un enrichissement interne correspondant à la mise en réserve de résultats excédentaires affectés sur décision de l’assemblée générale des membres.

Il convient de rappeler que cette approche « comptable » de la notion de fonds propres correspond à la contrepartie d’éléments détenus par l’association dans son patrimoine comme, par exemple, des immeubles, de la trésorerie disponible, des placements, mais également résultant d’opérations se traduisant par des flux de créances et de dettes d’exploitation. Il ne faut pas se méprendre sur le vocabulaire utilisé. Le terme « réserves » qui apparait dans les fonds propres ne veut pas dire pour autant que les sommes correspondantes à ces comptes du plan comptable général sont présentes en trésorerie et immédiatement disponibles.

Une fois déterminée à partir de ses composantes comptables, la valeur des fonds propres de l’association nécessite parfois quelques ajustements. Ceux-ci peuvent être justifiés par des éléments significatifs tels que :

  • la mise à niveau de certaines valeurs du patrimoine afin de prendre en compte une plus-value latente ;
  • l’introduction d’un patrimoine utilisé dans le cadre d’un contrat de crédit-bail ou de location financière.

Et enfin, pour passer de la notion de fonds propres à la détermination des ressources stables de financement, il suffit d’intégrer la fraction à long terme des dettes et emprunts qui ont été contractés pour financer des éléments durables du patrimoine de l’association. Il en va ainsi des emprunts bancaires traditionnels mais également des contributions financières durables parfois reçues d’une union ou d’une fédération qui est intervenue en soutien.

Quels changements apportés par la réforme ?

Plusieurs dispositions relatives à l’application de directives européennes ont été retenues par le normalisateur comptable et transcrites dans le plan comptable général. Certaines spécificités propres aux organismes sans but lucratif font l’objet d’adaptations énoncées dans le nouveau règlement comptable, d’autres ne peuvent être retenues. Ainsi, certaines règles introduites par le précédent règlement CRC n° 99-01 ont été abrogées pour laisser place aux règles du plan comptable général.

Les prêts à usage.

La disparition des valeurs des biens reçus en prêts à usage (commodats) tant à l’actif qu’au passif des bilans des organismes sans but lucratif aura un impact significatif pour appréhender la surface financière de certaines associations ou fondations. Tout comme pour un immeuble détenu au moyen d’un contrat de crédit-bail, il conviendra désormais de disposer en annexe des informations disparues des comptes annuels si on veut pouvoir apprécier correctement la surface financière de l’association et sa dépendance aux tiers.

Les subventions d’investissement.

L’ancien règlement permettait aux associations qui bénéficiaient de subventions d’investissement de distinguer selon que ces subventions visaient des biens renouvelables ou non par l’organisme lui-même. Cela avait comme conséquence la reprise ou non de cette subvention au compte de résultat au même rythme que l’amortissement du bien ainsi financé. Il conviendra désormais d’appliquer les dispositions du plan comptable général qui laisse le choix entre deux options :

  • soit intégrer la totalité de la subvention au compte de résultat au moment de sa perception ; libre ensuite à l’association d’affecter une partie du résultat dégagé pour un montant équivalent en réserve d’investissement, ce qui permet de « sanctuariser » à jamais cette ressource ;
  • soit rapporter cette subvention au compte de résultat par fractions annuelles pour neutraliser la dotation aux amortissements du bien ainsi financé.

Les fonds dédiés.

Le mécanisme des fonds dédiés a été introduit par le règlement précédent du 16 février 1999. Jusqu’à ce jour, il ne visait que des opérations de ressources à caractère d’exploitation.

Dès lors, en termes d’analyse financière, les fonds dédiés étaient plutôt traités comme des flux d’exploitation à court terme correspondant à des provisions pour charges ou bien comme des « produits constatés d’avance ».

Le nouveau règlement reprend ce dispositif mais il introduit une notion de « fonds dédiés sur investissements » dans le cas particulier, par exemple, d’aides ou de soutiens versés à leurs adhérents par des unions ou fédérations destinées à financer des investissement qu’il réalisent.

Dans ce cas, à l’aide des informations obtenues dans un tableau d’informations complémentaires dédiées fournies dans l’annexe, ces données doivent être intégrées dans l’analyse des fonds propres de l’organisme comme ce serait le cas s’il s’agissait d’une subvention d’investissement.

Pour conclure...

Comme on vient de le voir, l’ensemble de ces dispositions novatrices, si elles s’appuient sur des raisonnements de doctrine comptable, éloignent sensiblement le lecteur des comptes annuels d’une approche économique et financière. Il deviendra de plus en plus compliqué d’élaborer la situation financière d’une association sans détenir les informations complémentaires indispensables qui devront accompagner les comptes dans leur annexe comptable.

1 : Lettre Partenaire Associations – La réforme du plan comptable.
2 : La date d’application du nouveau texte est envisagée pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020. Le Règlement comptable n° 2018-06 du 5 décembre 2018 Relatif aux comptes annuels des personnes morales de droit privé à but non lucratif a été approuvé par le collège de l’ANC le 5 décembre 2018 et l’arrêté sera publié au JO avant le 31 décembre 2018.

Auteur

In Extenso pour le Crédit Mutuel