Xavier Delpech – Docteur en droit, pour Juris Associations – Partenaire Associathèque

Le bénévolat étant purement volontaire, il en résulte que conditionner le versement du revenu de solidarité active (RSA) à l’accomplissement d’une activité bénévole devrait en toute logique être illégal. La réponse à apporter à cette interrogation n’est en réalité pas si simple.

Nul ne l’a oublié. Il y a quelques années, un conseil départemental avait conditionné le versement du revenu RSA à l’exercice par les bénéficiaires de celui-ci d’une activité bénévole auprès d’une association ou d’une collectivité publique, sous peine de suspension de cette allocation. Cette décision avait été annulée par les juridictions administratives de première instance, tribunal administratif de Strasbourg, puis cour administrative d’appel de Nancy. Mais le Conseil d’Etat a censuré l’arrêt rendu par cette dernière.

Si la Haute juridiction administrative reconnaît la possibilité pour les départements d’imposer, en contrepartie du RSA, l’exercice d’activités bénévoles, il l’encadre néanmoins d’un certain nombre de conditions.

Avec pédagogie, il rappelle d’abord que, selon le code de l’action sociale et des familles (art. L. 262-27 à L. 262-39), les bénéficiaires du RSA ont droit à un accompagnement social et professionnel adapté à leurs besoins. Mais ils sont tenus, en contrepartie de cette allocation, à des obligations de recherche d’emploi ou d’insertion sociale ou professionnelle. À défaut, l’allocation peut valablement être suspendue.

En réalité, cette suspension n’est pas systématique. Tout dépend de la situation de l’allocataire.

À cet égard, le Conseil d’État distingue 3 cas de figure :

  • les bénéficiaires du RSA ou orientés vers Pôle emploi qui bénéficient d’un projet personnalisé d’accès à l’emploi et sont tenus d’accomplir des actes positifs et répétés de recherche d’emploi, ou visant à créer ou reprendre une entreprise (art. L. 262-34) ;
  • ceux, à l’inverse, qui, trop éloignés d’une démarche de recherche d’emploi, sont orientés vers des organismes d’insertion sociale (art. L. 262-36) ;
  • enfin, ceux qui ont été orientés vers un organisme participant au service public de l’emploi autre que Pôle emploi et qui doivent conclure avec le conseil départemental un contrat librement débattu, énumérant leurs engagements réciproques en matière d’insertion professionnelle, dans le cadre d’un accompagnement social et professionnel adapté à leurs besoins (art. L. 262-35).

C’est dans cette hypothèse uniquement que le Conseil d’État estime que le contrat d’insertion peut prévoir légalement des actions de bénévolat. Toutefois, cette activité bénévole ne saurait être systématique. Encore faut-il que ce contrat soit valable.

Le Conseil d’État pose 3 conditions à sa validité :

  • il doit s’agir d’un contrat personnalisé ;
  • les actions bénévoles doivent contribuer à une meilleure insertion professionnelle - et non insertion sociale - du bénéficiaire ;
  • ces actions doivent demeurer compatibles avec la recherche d’un emploi - notamment en termes d’heures à effectuer.

Ces conditions sont cumulatives. Les services sociaux du conseil départemental doivent procéder à une analyse concrète de la situation de l’intéressé s’ils entendent suspendre le revenu versé à l’allocataire. L’idée est qu’une action bénévole ne peut être imposée qu’à la condition qu’elle est utile au bénéficiaire du RSA, en contribuant à une meilleure insertion professionnelle de celui-ci. C’est donc son utilité pour le bénéficiaire, et elle seule, qui doit dicter la proposition de bénévolat.