Yves MAYAUD, Agrégé des Facultés de droit, directeur du Lamy Associations - Partenaire Associathèque

Une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux associations transfrontalières européennes a été publiée le 5 septembre 2023. Il s’agit de répondre à la nécessité de créer un environnement favorable au secteur à but non lucratif, dans le but de faciliter l’exercice effectif de la libre circulation des associations opérant dans le marché intérieur.

Le potentiel de ce marché ne peut être pleinement exploité que si tous les participants jouissent des mêmes droits, et, à cette fin, les associations à but non lucratif ont besoin d’un cadre juridique prévisible leur permettant de mener sans discontinuité leurs activités, y compris de manière transfrontalière. Or, elles obéissent à des régimes différents au sein de l’Union, de même qu’elles ne sont pas toujours reconnues d’un État membre à un autre, ce qui oblige à créer dans les États concernés des associations conformes à leur droit national, là où une structure européenne éviterait de tels relais. D’autres difficultés sont sensibles, relatives à l’accès aux prêts financiers ou aux garanties au sein des établissements de crédit, le caractère non lucratif des associations alourdissant la charge financière qu’elles doivent supporter lorsqu’elles veulent opérer au niveau européen. Toutes ces raisons, et d’autres encore, plaident pour un statut adapté, et c’est l’objet de la proposition de directive, favorable à la création d’associations transfrontalières européennes (ATE).

Il n’est pas question d’en faire un commentaire complet, et de passer en revue tout ce qu’elle préconise de mesures adaptées. Un seul point va nous retenir, lié aux responsabilités. La proposition précise que les États membres devront veiller à ce que les statuts de l’ATE contiennent des dispositions relatives aux « responsabilités de l’organe décisionnel et de l’organe exécutif », ainsi qu’aux « responsabilités des membres de l’organe exécutif ». C’est bien peu de choses, au regard de ce que le droit de la responsabilité, tant pénale que civile, emporte d’obligations et de contraintes, doublées de contentieux nombreux et complexes.

Mais il ne faut pas s’en étonner.

  • Pour ce qui est de la responsabilité pénale, le principe de territorialité veut que soit applicable la loi du lieu de commission de l’infraction (lex loci delicti), ce qui désigne tout naturellement l’État où le délit a été réalisé pour connaître, en référence à son droit national, de la responsabilité de l’auteur de l’infraction.
  • Sur la responsabilité civile, voire administrative, l’association européenne sera « régie par le droit de l’État membre dans lequel se situe son siège social », un droit lui-même déterminé par référence à l’entité juridique ou à la catégorie d’entités juridiques à laquelle chaque État devra l’assimiler (Proposition, article 3). C’est dire qu’une ATE ayant son siège social en France se verra appliquer le droit français de la responsabilité.

Mais, tôt ou tard, la matière devrait trouver une unité dans les principes supérieurs partagés entre tous les États de l’Union, et enrichis par les règles du droit international privé. Des principes qui ont été l’objet d’un long travail de recherche entrepris par le European Group of Tort Law, également connu sous le nom de Groupe de Tilburg, et qui ont naturellement vocation à servir d’instrument de rapprochement entre les partenaires européens.

De nouveaux horizons pour les associations, et pour ... les juristes !