Les préfets peuvent décider de dérogations afin d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques.

Afin de prendre des décisions non réglementaires relevant de leur compétence, un décret du 8 avril 20201 avait reconnu aux préfets de région et de département le droit de déroger aux normes arrêtées par l'administration de l'État dans certains domaines limitativement énumérés (droit également reconnu aux représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer).

Ces matières, énumérées à l’article 1er du décret, sont au nombre de sept ; y figurent, en particulier :

  • les concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales ;
  • l’environnement, l’agriculture et les forêts ;
  • ou encore les activités sportives, socio-éducatives et associatives.

Cette possibilité de dérogation avait, dans un premier temps, fait l’objet d’une expérimentation d’une durée de deux ans2.

Craignant un contournement des règles de protection de l'environnement, une association avait demandé l’annulation du décret expérimental, mais en vain3.

Elle a, avec d’autres, contesté le texte pérennisant le dispositif, sans plus de succès.

L’examen de ce nouveau recours donne l’occasion au Conseil d'État de compléter le mode d'emploi du droit à dérogation du préfet. « Le décret attaqué, selon ses termes mêmes, ne peut conduire les préfets à décider de dérogations qu'afin d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques. De telles dérogations ne peuvent intervenir que dans les matières limitativement énumérées à l'article 1er du décret ». En outre, ces dérogations doivent être « justifiées par un motif d'intérêt général » ; elles ne doivent porter ni « atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens », ni une « atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé ». Enfin, elles ne peuvent être accordées que « si et dans la mesure où des circonstances locales justifient qu'il soit dérogé aux normes applicables, sans permettre aux préfets, dans le ressort territorial de leur action, de traiter différemment des situations locales analogues ».

Ces conditions particulièrement restrictives sont censées prévenir tout risque d’arbitraire de la part du préfet. Nul doute que les associations y veilleront.

1 : Décr. n° 2020-412 du 8 avr. 2020, JO du 9
2 : Décr. n° 2017-1845 du 29 déc. 2017, JO du 31
3 : CE 17 juin 2019, n° 421871

Auteur

Juris associations pour le Crédit Mutuel