Vous avez dit lobbying ?

Le lobbying est né au XIXème siècle aux États-Unis. Le lobby en anglais désigne le couloir d’un bâtiment ou le hall d’un hôtel. Faire du lobbying, c’est donc aussi bien faire antichambre que discuter dans les couloirs. Le lobbying est aujourd’hui répandu aux États-Unis et tous les acteurs sociaux le pratiquent, pas seulement les entreprises. Dans ce pays comme au Royaume-Uni, il apparaît comme une pratique normale de la part de groupes qui défendent des intérêts. La puissance de l’Union européenne l’a banalisé à Bruxelles.

En France, le lobbying est encore entaché d’une réputation sulfureuse et parfois confondu avec des pratiques contestables comme le trafic d’influence ou la corruption active.

Il faut être capable de reconnaître le lobbying pour ce qu’il est : une méthode de négociation qu’un groupe représentant un intérêt particulier met en jeu auprès d’un pouvoir constitué (en général un pouvoir politique ou législatif).

L’influence peut s’exercer à tous les niveaux, y compris le niveau très local. Une association seulement représentée dans une commune peut se trouver confrontée à une situation qui la conduira à exposer des arguments auprès du maire et à se comporter comme un groupe de pression. Pour réussir dans son entreprise elle devra s’y prendre comme une ONG tentant de faire pression sur un État.

S’il n’existe pas de recette unique pour faire du lobbying, il y a néanmoins quelques règles de méthode qu’il faut savoir employer.

Définir les enjeux

Une action de lobbying commence par la définition précise de l’objectif visé. Que veut-on obtenir ?

  • Veut-on abolir une obligation qu’on estime injuste ou insupportable pour une catégorie de personnes ?
  • Au contraire, veut-on faire en sorte que soit imposée une contrainte à des tiers pour défendre l’intérêt d’un groupe (interdiction de fumer dans les lieux publics, interdiction de chasser telle espèce animale, interdiction de construire dans tel site protégé, interdiction de polluer) ?
  • Veut-on obtenir un avantage financier, un avantage économique, un avantage commercial, une allocation, un remboursement, une prise en charge, la reconnaissance d’un statut, la prise en compte d’une déficience ?

Analyser la situation

L’objectif étant défini, il faut clarifier :

  • les publics cibles : qui sont les décideurs ? qui sont les prescripteurs ou les alliés (ceux qui peuvent aider ou intervenir auprès des décideurs) ?
  • le contexte : quel est le contexte politique, réglementaire, économique ?
  • le chemin et les moyens d’action : quelle est la procédure à mettre en œuvre ?

Mettre en forme l’objectif

L’objectif doit ensuite être mis en forme de manière concrète.

Il faut s’assurer de sa faisabilité et en dessiner les contours juridiques ou réglementaires. En matière de lobbying la connaissance de la loi, même si on en conteste le bien-fondé, est indispensable.

Conseil

Au-delà, il faut faciliter l’avancée du projet que l’on défend en organisant les conditions permettant de le réaliser. Par exemple, si l’on veut convaincre un député de déposer une proposition de loi, il vaut mieux lui proposer la rédaction de cette proposition de loi dans la forme finale qu’elle devra prendre pour être présentée au Parlement.

Demander le possible

Même si l’association est le lieu où peuvent se défendre toutes les utopies, il faut éviter de faire du lobbying pour demander l’impossible. Il vaut mieux agir par étapes, il est plus efficace de progresser par paliers.

Conseil

Progresser par paliers

Par exemple, avant de tenter d’obtenir la généralisation d’une réglementation, il est souvent intéressant d’avancer à l’aide d’expériences pilotes. L’association peut avantageusement proposer des expérimentations qui permettent de tester une méthode sans s’engager dans une voie dont les interlocuteurs ne perçoivent pas immédiatement l’intérêt ou les aspects positifs.

Pour accroître les chances de réussite, il est utile par ailleurs de proposer un objectif acceptable par les pouvoirs publics. Il faut alors expliquer, voire démontrer comment l'objectif s’intègre dans les politiques publiques. Il faut aussi tenir compte des contraintes des décideurs : éviter les réformes trop lourdes ou les dépenses nouvelles trop importantes, s’inscrire dans un calendrier compatible avec celui des décideurs. Le lobbying, c’est souvent la politique des petits pas et les petits pas permettent d’avancer lorsqu’on est patient.

Maîtriser l’information

En tant que groupe de pression défendant un intérêt particulier, l’association doit apparaître comme un expert du sujet qu’elle promeut. Elle doit donc veiller à rassembler toutes les informations nécessaires à l’action, tant sur le fond du dossier que sur les événements qui l’environnent.

Cela la conduit à mettre en jeu des techniques de veille, d’analyse documentaire, d’échanges d’informations avec des interlocuteurs utiles (experts, élus, membres de l’administration, etc.) et à présenter les argumentations convaincantes, à l’appui des thèses qu’elle soutient.

Témoigner

L’expertise que lui confère sa connaissance du sujet permet à l’association de développer une argumentation rationnelle. Celle-ci est utilement complétée par les expériences vécues et illustrée par des témoignages qui viennent lui donner de la chair et ajoutent de l’empathie au contenu purement objectif.

Nouer des alliances

L’action collective est souvent avantageuse. Il faut donc, chaque fois que cela est possible, repérer les acteurs qui défendent des intérêts identiques ou similaires et monter des plates-formes communes ou construire des actions qui seront menées, selon les cas, ensemble ou de façon parallèle.

Les acteurs de l’économie sociale et solidaire préfèrent souvent employer le terme de « plaidoyer » : la même logique et les mêmes règles s’appliquent.

Conseil

Pour éviter les suspicions dans votre « lobbying », soyez transparents !

Vis-à-vis de vos interlocuteurs à convaincre et vis-à-vis de vos adhérents et du grand public :

  • soyez clairs sur les objectifs réels défendus,
  • informez vos adhérents et sympathisants de vos démarches,
  • veillez à ce que la situation personnelle ou professionnelle d’un membre de l’association (surtout s’il est élu au sein de l’association) ne décrédibilise pas tout votre discours.