Qui décide d’attribuer une subvention ?

Les subventions versées par les collectivités territoriales sont déterminées par leur conseil respectif : municipal, départemental ou régional. Ces deux derniers peuvent déléguer cette compétence à leur commission permanente, alors que le conseil municipal ne peut pas en charger le maire.

L’attribution des subventions fait l’objet d’une délibération particulière.

Attention

L’association doit veiller à ce que la délibération lui attribuant une subvention n’ait pas été prise par un ou plusieurs conseillers « intéressés » à l’affaire, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires (CGCT, art. L. 2131-11), sous peine d’annulation de cette décision par le juge administratif. Cela s’applique à toutes les délibérations du conseil municipal, y compris les délibérations qui formulent un simple avis sur un vœu. La participation de ce conseiller à la délibération doit avoir exercé une influence effective sur le conseil municipal.

Des conseillers municipaux qui sont présidents et membres du conseil d’administration d’une association sont intéressés dès lors que l’objet de la délibération est d’accorder la garantie de la commune à un emprunt souscrit par cette association. Le seul fait d’avoir participé à la délibération justifie son annulation, que la participation du conseiller municipal ait eu une incidence ou pas sur le résultat.
CE 9 juillet 2003, Caisse régionale du crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne, req. n° 248344

Par ailleurs, le même risque existe en matière pénale avec le délit de prise illégale d’intérêts. En effet, le fait, par un élu, d’intervenir ne serait-ce que de façon indirecte (y compris par un avis) dans la décision d’attribution d’une subvention à une association dans laquelle il a un intérêt personnel, est puni de 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction. Selon la chambre criminelle de la Cour de cassation, le seul intérêt moral qu’un élu peut avoir à favoriser une association dont il est par ailleurs administrateur, même à titre bénévole, est suffisant pour caractériser le délit.

Par exemple, un maire a commis le délit de prise illégale d’intérêts en transmettant, avec un avis favorable pour sa reconduction, une demande de subvention présentée par une association dans le fonctionnement de laquelle il avait une grande influence. C’est également par cette association qu’il avait été démarché dans le but de faire travailler, pour le compte de celle-ci, une entreprise commerciale dont il assumait la direction.
Crim. 9 mars 2005, n° 04-83.615

En revanche, le délit n’est pas constitué dans le cas d’un ancien maire qui avait accordé, sans paiement d’une redevance, à une association animée par l’un de ses ex-adjoints une autorisation de tournage dans des locaux municipaux d’un film produit par une société dont ce dernier était l’associé majoritaire. Il s’avérait, en effet, que l’ancien maire n’entretenait pas de relations amicales avec son ancien adjoint. Il ne détenait, par ailleurs, aucune participation dans sa société ni n’avait aucun rôle dans son association.
Crim. 13 mars 2018, n° 17-86.548

Afin de simplifier la notion de prise illégale d’intérêts, la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire a précisé sa définition jusque-là trop large. L’article 432-12 du code pénal modifié par ce texte retient désormais un intérêt « de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité ».

Conseil

En cas de doute sur la présence d’un conseiller intéressé, il est prudent de mettre en garde la personne concernée en lui demandant de ne prendre part ni à la proposition, ni à la préparation de la décision, voire, s’il s’agit d’un membre de l’exécutif de la collectivité publique (maire, adjoint) de démissionner préalablement de son mandat d’administrateur de l’association.

Quel est le délai pour l’attribution d’une subvention ?

Les collectivités territoriales disposent d’un délai de 2 mois pour examiner les demandes de subvention, à compter de la réception du dossier complet. Entre temps, un élément d’information complémentaire peut être demandé à l’association prolongeant d’autant ce délai. Si passé celui-ci, l’association n’a pas reçu de réponse, elle doit considérer qu’elle est négative.
Code des relations entre le public et l’administration [CRPA], art. L. 231-4

Précision :

Une subvention allouée après une manifestation peut être légale. En effet, rien ne s’oppose à ce que la subvention soit attribuée après le déroulement de la manifestation, dès lors que les conditions vérifiées au besoin par le juge administratif sont remplies (manifestation présentant un intérêt pour les habitants de la collectivité, tenue à la date indiquée de la manifestation).

La mise en place de la subvention

Convention

La subvention peut être mise en place par le seul biais d’une décision d’attribution. Toutefois, certaines collectivités préfèrent signer une convention. De plus, dans certains cas, une convention écrite est obligatoire.

Cette obligation résulte :

  • soit du fait même de la nature de l’activité subventionnée (cas par exemple des associations sportives, du financement d’équipements ou de travaux pouvant profiter aux pratiquants d’un culte, d’établissements privés d’enseignement secondaire général...),
  • soit du montant de la subvention accordée. Dans ce dernier cas, l’établissement d’une convention est obligatoire pour toute subvention sous forme monétaire uniquement (et non représentée par des prestations en nature) d’un montant annuel supérieur à 23 000 € (en savoir plus sur le contenu de la convention).

Lorsqu’une association veut inscrire un projet dans la durée, elle doit conclure, avec la collectivité qui la subventionne, une convention pluriannuelle d’objectifs (CPO).

Elle permet, en dehors de la subvention initiale correspondant à la première année d’exécution, et sous réserve de la disponibilité des crédits, un financement prévisionnel et conditionné pour les années suivantes.

Elle est en principe signée pour 4 ans renouvelables éventuellement, selon des modèles présentés par la circulaire dite Valls du 29 septembre 2015 qui ne sont cependant pas obligatoires dans les rapports entre collectivités territoriales et associations.

Les modèles de CPO s’appliquent à toutes les subventions monétaires ou non destinées à financer des associations.

Le modèle simplifié de CPO est utilisé pour des projets associatifs à caractère non économique quel que soit le montant des subventions, et pour les projets à caractère économique en dessous d’un seuil de 500 000 € de subventions sur 3 ans.

Le second modèle de CPO est utilisé quant à lui pour des projets associatifs à caractère économique au-dessus d’un seuil de 500 000 € de subventions sur 3 ans.

La publication en open data des données essentielles des conventions de subventions est une obligation, lorsque celles-ci dépassent le seuil de 23 000 € : autorité attribuant la subvention, association attributaire, précisions sur la subvention elle-même (montant, nature, calendrier de versement et, le cas échéant, répartition de la subvention entre plusieurs attributaires au titre d’un même projet).
L. n° 2016-1321 du 7 oct. 2016, art. 18 modifiant art. 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avr. 2000

Depuis le 1er août 2017, les collectivités locales attribuant une subvention faisant l’objet d’une convention pourront choisir soit de publier sur leur site internet, sous 3 mois à compter de la signature de la convention, les données relatives à cette subvention, soit transmettre ces données à l’autorité en charge du portail unique interministériel de mise à disposition des données publiques. Toutefois, et dans ce dernier cas, la collectivité devra au moins faire figurer sur son propre site un lien vers les données ainsi publiées. Cette obligation ne s’applique pas aux collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants ni à leurs établissements publics.

Conseil

Certaines précautions doivent être prises lors de la rédaction de la CPO. Pour éviter une requalification en marché public qui serait passé illégalement (puisque dépourvue de toute mise en concurrence), il faut privilégier des formulations et des mots mettant en avant l’initiative privée de l’association.

La Cour de discipline budgétaire et financière a récemment condamné au paiement d’une amende le président d’une chambre d’agriculture, signataire de conventions annuelles passées avec une association. Cette dernière avait pour objet aux termes de ces contrats d’assister et de conseiller les membres de l’établissement et plus généralement les agriculteurs de la région concernée dans l’exercice de leur profession, en leur apportant tous les services et informations nécessaires, moyennant un prix fixé sous la forme d’un versement forfaitaire annuel.

La juridiction financière a donc requalifié les conventions de subvention en marchés publics en considérant qu’elles visaient à répondre exclusivement aux besoins propres de cet établissement.
CDBF 23 févr. 2019, n° 231.7710, JO du 7 avr.

Par ailleurs, la circulaire Valls du 29 septembre 2015 (annexe 4) préconise l’insertion d’une clause selon laquelle, en cas de non-respect par l’une ou l’autre des parties des engagements inscrits dans la convention, celle-ci pourra être résiliée de plein droit par une des parties dans un délai de trois mois suivant l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception valant mise en demeure.

Attention

Des échanges de mail entre une commune et une association au sujet d’une demande de subvention, en particulier sur le montant sollicité, ne constituent pas une promesse de versement.

Il en a été ainsi jugé à propos de différents échanges qu’une association, organisant une journée de commémoration de la traite négrière, de l’esclavage et de leur abolition, avait eu avec la direction générale de la politique d’une ville. Même si la commune lui avait demandé par courriel « de revoir à la baisse le montant des subventions demandées », le fait que l’association lui ait adressé en réponse un nouveau budget prévisionnel en diminution, ne suffit pas à considérer qu’elle bénéficiait d’un engagement formel de versement d’une subvention, à plus forte raison pour un montant déterminé correspondant à son projet de budget.

CAA Marseille 8 févr. 2016, Assoc. Vent d’Afrique, req. n° 14MA02726

Quand intervient le versement de la subvention ?

Le versement de la subvention à l’association intervient en une seule fois ou par des paiements échelonnés selon un calendrier fixé dans la délibération du conseil municipal, départemental ou régional.

Dans le cadre d’une convention pluriannuelle d’objectifs, des avances peuvent être consenties aux bénéficiaires de subventions. 50 % du montant de la subvention annuelle est automatiquement versé avant le 31 mars de chaque année, sauf cas de refus motivé.

Une subvention peut-elle être annulée ?

Cas de la subvention allouée par décision

Une décision d’attribution d’une subvention crée des droits au profit de l’association qui en est bénéficiaire. Elle ne peut donc être annulée que pour illégalité dans les 4 mois qui suivent son adoption ou lorsque les conditions auxquelles elle est subordonnée ne sont pas respectées.
CE, ass., 26 octobre 2001, Ternon, req. n° 197018

Exemple

Un département peut demander à une association le remboursement des subventions accordées pour l'acquisition de matériels divers faute de pouvoir fournir les pièces justificatives demandées lors d’un contrôle de cette collectivité.

CAA Marseille 28 mars 2022, req. n° 20MA03727

Bon à savoir

En dehors de ces deux hypothèses, toute annulation est illégale et la commune qui y procéderait s’exposerait à être condamnée au versement de la subvention.

Dans le cas où la juridiction administrative annule une décision d’attribution de subvention pour vice de forme ou irrégularité de procédure (ce qui est assez fréquent), l’association n’est plus à reverser immédiatement la subvention litigieuse, la collectivité concernée ayant la possibilité, dans un délai déterminé par la décision juridictionnelle, de régulariser le versement de l’aide.
CE, sect., 1er juill. 2016, Cne d’Emerainville et syndicat d’agglomération nouvelle de Marne-la-Vallée-Val-Maubuée, req. nos 363047 et 363134

Par ailleurs, la collectivité territoriale peut voir engager sa responsabilité pour faute si elle alloue à une association une subvention au terme d’une procédure irrégulière et sans prévenir cette dernière de la probabilité d’une perte définitive de cette aide. Dans ces conditions, l’association peut se prévaloir d’un préjudice alors même que l’attribution d’une subvention ne constitue pas un droit et est discrétionnaire. En cas d’annulation de la subvention et si celle-ci a entièrement été utilisée conformément à son objet, les dommages et intérêts pourront comprendre le montant total de la subvention versée irrégulièrement mais aussi, le cas échéant, des frais financiers liés à l’emprunt contracté par l’association pour rembourser la commune.
CE 20 juin 2012, Commune de Dijon, req. n° 342666

Cas de la subvention allouée par convention

Une convention crée pour l’association un véritable droit à bénéficier de la subvention à condition qu’elle respecte les conditions prévues par la convention à l’octroi de l’aide.
Toutefois, en l’absence de respect de ces dernières, notamment en cas d’absence de réalisation de l’opération projetée, la collectivité dispose d’un délai de 5 ans pour demander sa restitution.
Ce délai court du jour où la collectivité a eu connaissance de cette défaillance et non du versement de l’aide.
CAA Marseille 5 févr., 2019, Association Olympic Judo Nice, req. n° 18MA01939

Bon à savoir

Une collectivité peut décider d’arrêter le versement d’une subvention annuelle d'aide au fonctionnement d’une association établie dans le cadre d'une convention d'objectifs et de moyens. En effet, cette suspension est justifiée dans la mesure où l’association n’a pas pu justifier d'une utilisation de la subvention conforme à son objet. Dans cette affaire, un contrôle des services de la collectivité a révélé des versements importants au profit d'une autre association sans que la convention le prévoit.

CAA Toulouse 7 juin 2022, req. n° 20TL20132

Toutefois, lorsque cette convention a le caractère d’un contrat administratif (contrat accordant à l’association une mission de service public ou comportant des clauses inhabituelles dans les relations entre personnes privées, comme l’occupation du domaine public), la commune peut, pour des motifs d’intérêt général, décider de la modifier ou de la résilier unilatéralement.

Mais le fait qu’une association bénéficiaire d’une subvention au titre d’une convention passée avec une collectivité territoriale aurait eu « un comportement souvent partisan et peu constructif » n’est pas un motif d’intérêt général. En effet, ladite collectivité n’apporte aucune preuve du non-respect par l’association de ses engagements ou d’un comportement incompatible avec ses engagements.
CAA Lyon 11 juin 2020, req. n° 18LY02773

En cas de résiliation et en l’absence de faute de sa part, l’association a droit à être indemnisée du préjudice que lui cause la perte des subventions. En cas de modification, l’association peut demander le maintien de l’équilibre financier du contrat, en particulier si des charges supplémentaires lui sont imposées.

Bon à savoir

Le recours contentieux mis en place par la jurisprudence Tarn-et-Garonne, qui permet à tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts, par sa passation ou ses clauses, de former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, ne peut pas être exercé lorsque le litige porte sur une convention ayant pour objet l’octroi d’une subvention.
Par conséquent, seul le recours pour excès de pouvoir est ouvert contre les actes y compris les contrats relatifs aux subventions.

CE, ass., 4 avr. 2014, req. n° 358994
CE, avis, 29 mai 2019, Sté Royal Cinéma, req. n° 428040

Attention

Le fait, pour le bénéficiaire d’une subvention, de ne pas se conformer aux dispositions de la loi Toubon, qui impose dans certaines situations précisément définies l’emploi de la langue française (notamment dans les annonces sur la voie publique, dans les lieux ouverts au public et dans les transports en commun) et destinées à l’information du public, peut être sanctionné par la mise en œuvre d’une procédure de restitution.

CAA Lyon 4 juin 2020, Association de défense de la langue française en pays de Savoie, req. n° 18LY01058

La subvention attribuée au profit d'une association en vue de l'organisation d'un festival dont l'orientation politique est marquée, doit être annulée, car elle contrevient au principe de neutralité qui s'impose aux collectivités territoriales.

CAA Lyon 8 avr. 2021, Région Bourgogne-Franche-Comté, req. n° 20LY03681

Effets de la perte de subvention sur l’activité associative

La perte d’une subvention peut avoir des conséquences parfois importantes pour l’association qui vont de la diminution du niveau de prestations fournies, en passant par des diminutions de dépenses de fonctionnement jusqu’à la liquidation de la structure pour les hypothèses les plus extrêmes. La perte d’une subvention grâce à laquelle l’association survivait financièrement peut ainsi légalement justifier le licenciement économique de la salariée occupant un poste de comptable.
Soc. 30 sept. 2020, n° 18-24.073